Le dépôt de la liste Yewwi Askan wi de Dakar a donné lieu, ce mercredi, à des empoignades entre le maire de la capitale Barthélémy Dias et les forces de l’ordre.
Le maire a voulu forcer le passage des locaux de la Direction générale des Elections (Dge) pour permettre à un Huissier de Justice, commis à cet effet, de faire le constat du refus par cette direction d’enregistrer les noms des suppléants de deux personnes qui ont désisté.
Il a tenté d’en découdre. Ce qui, en soi, est malencontreux. Pour plusieurs raisons !
La première est que Barth’ n’est pas le mandataire de la coalition. Celle-ci en a deux, dont Déthié Fall à qui l’on ne pouvait pas refuser l’entrée.
Par conséquent, Déthié qui a les compétences et le charisme nécessaire, pouvait mener la ‘’bataille’’, conformément à la loi. En décidant de s’inscrire dans une dynamique de confrontation, Barth’ continue à jouer sur le registre de la communication politique.
Or, il pouvait laisser l’initiative à ses mandataires et l’Huissier faire également un constat du refus de la Dge de le laisser entrer dans les locaux.
L’autre raison est que l’acte de résistance contre les forces de l’ordre est un acte caractérisé de refus d’obtempérer, d’outrage à agents dans l’exercice de leurs fonctions, de résistance, etc. Tous actes pouvant constituer des cas avérés de flagrants délits et même aboutir à son arrestation.
Heureusement les forces de l’Ordre ont opté pour l’apaisement.
Mais, dans le fond de ses réclamations et non de sa démarche, Barth’ n’a pas complètement tort. Car, si en effet l’article L179 ne prévoit pas le cas de désistement et qu’il y a un vide juridique, l’administration aurait dû interpréter la loi dans l’esprit général des libertés publiques et démocratiques en vogue au Sénégal en considérant que ‘’tout ce qui n’est pas interdit est permis’’. Le remplacement de ces deux désistements s’inscrit parfaitement dans l’esprit du Code électoral.
Par ailleurs, la liste de Yewwi risque d’être recalée pour le motif lié au non-respect du parrainage comme stipulé par la loi.
En effet, sur cette question, la loi est ferme. Toutefois, là aussi, la coalition Yewwi parle de tripatouillage de sa liste par la Dge. Barth’ et ses mandataires soutiennent que la liste déposée n’est pas celle rendue publique. Et que manifestement, les manœuvres ont pour motivation principale de les empêcher d’engranger les sept députés de la liste départementale de Dakar, comme en 2017.
Pourtant, au regard de ces deux obstacles majeurs, la liste de Yewwi pour les départementales de Dakar, pourrait être invalidée.
Malheureusement, comme le malheur n’arrive pas seul, Yewwi enregistre une rébellion sans commune mesure en son sein.
En effet, neuf leaders et pas des moindres, qui estiment que les investitures ne les arrangent pas, ont sorti un communiqué, avec des mots durs contre Khalifa Sall et Ousmane Sonko qualifié de complice.
C’est le risque pour ces genres de coalition d’engendrer de la frustration attentatoire à l’unité à long terme. Chaque leader de parti ou de mouvement, souhaite, à défaut d’être président de la République, siéger à l’Assemblée nationale. Ces querelles, qui rappellent celles des bornes fontaines, renvoient une mauvaise image de Yewwi, une coalition qui, jusqu’ici, ne cesse de prôner la rupture.
En tout état de cause, ce qui aurait été bénéfique pour la coalition, c’est que nombre de ses leaders acceptent d’en découdre au niveau de la liste départementale et évitent la liste nationale, qui, du reste, est plus commode pour se faire élire.
Malheureusement, beaucoup ont opté pour la facilité, d’où le télescopage constaté au niveau de la liste nationale.
C’est dire, dans tous les cas, que Yewwi traverse une crise majeure de croissance qui va, dans les prochains mois, déterminer son avenir. Va-t-elle se renforcer ou s’éclater ?
L’avenir nous le dira.
Assane Samb
Nous sommes entièrement d’accord avec Mr. Moundiaye Cissé, membre éminent de la société civile, pour que la loi soit appliquée dans toute sa rigueur à la coalition Yewwi Askan Wi.
Mais de la même manière, la loi devra l’être concernant BBY, sur le dépassement du nombre maximum de parrains !
À ce propos, nous remercions M. Benoit Sambou d’avoir rapporté la preuve par l’aveu, de la réalité du fait que BBY a effectivement déposé un nombre de parrainages supérieur au maximum fixé par la loi.
Lorsqu’il s’était agi de Malick GAKOU, alors candidat à l’élection présidentielle de 2019, la DGE avait rejeté sa candidature. Ayant introduit un recours auprès du Conseil Constitutionnel, le juge constitutionnel avait estimé que l’excédent d’un seul parrain suffit pour entraîner l’invalidation d’une candidature.
M. Benoit Sambou, pour exonérer BBY, incrimine une clé USB. Il convient donc de lui rappeler qu’une loi ne s’adresse ni aux animaux ni aux objets, elle s’adresse aux êtres humains qui en sont les maîtres.
Dans cette affaire, le paradoxe est que M. Sambou, pour se justifier, déclare que « Benno a le droit de déposer autant de signature qu’il veut, mais le logiciel ne prendra en compte, pour vérification, qu’un maximum de 55327 parrainages ».
Or dans l’affaire Malick GAKOU, le juge constitutionnel affirme dans sa décision que « c’est lors du dépôt initial des listes de parrainage qu’il ne faut pas dépasser le nombre de parrainages autorisé par la loi… (et qu’à cette occasion le dépassement d’un seul parrain entraîne l’irrecevabilité) ».
Par ailleurs, force est de constater que Benoit Sambou a eu le loisir de lire et de relire le récépissé avant d’y apposer sa signature pour en affirmer l’exactitude. De plus, dans la déclaration publique qu’il a faite sous la supervision de la coordonnatrice nationale de BBY qui ne l’a pas démenti, Benoit a mentionné le chiffre de 55328 fiches de parrainage. Cet aveu qui est la mère des preuves est même authentifié par le visa de la CENA.
Maintenant, il est à se demander si le juge constitutionnel va se dédire pour procéder à une application distributive de la loi ? Ce serait là une voie qu’il serait hasardeux d’emprunter, parce qu’elle constituerait la preuve irréfutable d’un manichéisme d’État, donc d’une injustice, source de révolte dans une République selon Platon et un motif de résistance selon Locke.
Dans tous les cas, il y aurait forfaiture si le ministre Antoine Diome rectifiait frauduleusement cette violation de la loi électorale déjà avouée et démontrée par le mandataire de BBY. En tout cas, il est regrettable de constater que face à une situation aussi grave pour la coalition dont il est le mandataire, M. Sambou, faute d’arguments, se présente à l’opinion, l’injure à la bouche.
Ce qui est instructif dans tout cela, est que le sieur Amadou Ba et le juriste Seybani Sougou, n’ont fait que rappeler au Président Macky Sall, chef de la coalition BBY, la sagesse de ce grand empereur romain qui disait : « À chaque fois que je légifère, je tremble à l’idée que la loi que je suis en train de promulguer pourrait m’être appliquée un jour ».