Depuis quelques années, la scène politique sénégalaise est marquée par une profonde crise au sein des partis, notamment celles dites « traditionnelles ». Les activités de ces partis qui s’illustraient jadis par leur dynamisme et leur présence remarquée dans le débat politique national, se résument aujourd’hui à la publication de communiqués ou de déclarations de presse, souvent rédigés par une poignée de responsables dépourvus de toute légitimité, sinon leur loyauté au chef.
Assistons-nous à un déclin irréversible des partis politiques sénégalais ? La question mérite bien d’être posée, au regard de la situation de léthargie qui frappe aujourd’hui la quasi-totalité des formations politiques, notamment celles dites « traditionnelles ». Du Parti socialiste (PS) à l’Alliance pour la République (APR), en passant par le Parti démocratique sénégalais (PDS), la Ligue démocratique (LD), l’Alliance des forces de progrès (AFP) ou encore Rewmi, pour ne citer que ces formations, le constat est partout le même. Toutes ces organisations traversent une profonde crise, provoquée dans la plupart des cas par le détournement de leur mode de fonctionnement au profit de la défense des intérêts personnels du leader et de son entourage proche, plutôt que par la promotion d’idéaux ou d’un programme politique cohérent.
Au Parti socialiste, après la décision de feu Ousmane Tanor Dieng lui-même imposé à la tête du parti par l’ancien président Abdou Diouf lors du « congrès sans débat », de maintenir ce parti pionnier sous la coupole de l’Apr au sein de Benno Bokk Yakaar accentuant ainsi sa perte d’autonomie, aujourd’hui, l’actuelle secrétaire générale, Aminata Mbengue Ndiaye, s’est offert un mandat illimité sous le couvert d’un intérim indéterminé. Au Pds, l’ancien président libéral Abdoulaye Wade, en propulsant son fils biologique Karim à la tête du parti au détriment des militants historiques, a provoqué une vague de frustrations et de départs parmi les responsables. Même constat au sein du parti Rewmi, dont le fonctionnement est entièrement rythmé par les humeurs de son fondateur, l’ancien maire de Thiès, Idrissa Seck, qui semble ainsi perpétuer les mêmes pratiques qu’il reprochait jadis à son mentor, Abdoulaye Wade.
Résultat : les activités de ces partis, qui jadis s’illustraient par leur dynamisme et leur présence remarquée dans le débat politique national, se résument aujourd’hui à la publication de communiqués ou de déclarations de presse, souvent rédigés par une poignée de responsables dépourvus de toute légitimité, sinon leur loyauté au chef. La preuve : nombreux sont les cadres frustrés par l’absence de renouvellement du leadership, le manque de mécanismes internes de débat et la faible participation des militants. Beaucoup ont été poussés vers la sortie ou ont préféré jeter leur carte de membre pour créer leur propre mouvement ou leur propre parti politique accentuant au Sénégal le phénomène de prolifération des partis sans véritable idéologie.
NANDO CABRAL GOMIS