Alors que le pays traverse une période budgétaire délicate, la moindre dissension au sommet de l’État pourrait fragiliser la confiance des investisseurs et compromettre la dynamique économique. Le récent remaniement au sein de la coalition présidentielle ravive les interrogations sur la cohésion du tandem Diomaye–Sonko, dont l’entente demeure essentielle à la stabilité nationale.
Dans un contexte marqué par un endettement croissant et une tension budgétaire persistante, le Sénégal ne peut se permettre la moindre fissure politique au sommet de l’État. La récente décision de démettre Aïda MBodj de la tête de la coalition Diomaye Président au profit d’Aminata Touré a suscité des réactions contrastées au sein du Pastef et de son alliance. Ce changement, loin d’être anodin, révèle des tiraillements internes qui, s’ils s’amplifient, mettraient à mal le duo présidentiel.
Or, la stabilité économique du pays repose sur un équilibre fondé sur la confiance, la prévisibilité et la cohérence de l’action publique. Une divergence durable entre le président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko provoquerait une onde de choc sur les marchés financiers et inquiéterait les partenaires internationaux.
Les investisseurs, sensibles à tout signe d’instabilité, réévalueraient aussitôt le « risque Sénégal ». Les Investissements Directs Étrangers se contracteraient, les projets d’infrastructures prendraient du retard, et les agences de notation dégraderaient la note souveraine du pays, renchérissant le coût de la dette. Ce climat d’incertitude compromettrait les réformes budgétaires en cours au nombre desquelles la maîtrise de la masse salariale, la rationalisation des dépenses et la réforme des subventions, piliers essentiels de l’assainissement financier.
Les répercussions d’une instabilité seraient multiples aux rangs desquels les PME, déjà fragiles, verraient leur accès au crédit se restreindre, tandis que les grands projets énergétiques, ferroviaires et pétroliers subiraient des retards préjudiciables à la croissance. Celle-ci, projetée à plus de 7 %, pourrait rapidement s’essouffler. Le chômage des jeunes, déjà préoccupant, s’aggraverait, nourrissant les tensions sociales.
Sous ce constat, trois scénarios s’esquissent : la rupture, qui provoquerait un choc économique brutal ; la cohabitation conflictuelle, source d’immobilisme et de lenteur réformatrice ; ou la réconciliation, seule issue capable de restaurer la confiance et de relancer la dynamique de développement.
Au-delà des rivalités partisanes, l’enjeu est historique. Chaque mois d’instabilité politique se traduit par des milliards de francs CFA perdus et des opportunités économiques manquées. Dans un pays en quête d’émergence, la stabilité n’est pas un idéal abstrait : c’est une condition vitale à la prospérité collective.
C’est pourquoi il revient à Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko d’accorder leurs visions et de préserver l’unité politique qui fonde la confiance nationale. L’histoire retiendra moins leurs divergences que leur capacité à hisser le Sénégal vers un avenir de cohésion, de croissance et de dignité économique.
JEAN PIERRE MALOU

