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vendredi, avril 19, 2024
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Quand Macky Sall ressuscite la Françafrique pour un éventuel troisième mandat

par admin

« Élu le 28 mars 2012, le nouveau président sénégalais Macky Sall s’est finalement refusé à exiger le paiement d’un loyer par la France, décidant que la France pourrait bénéficier du site de Rufisque à titre gracieux, et a signé le traité le 18 avril 2012 à l’occasion de sa visite en France ». République Française.

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France-Afrique, une expression qu’aurait inventée l’ancien président de la Côte d’Ivoire, Houphouët-Boigny, pour décrire la complexité des relations économiques, militaires, politiques et les liens sociaux qui unissaient la France à ses anciennes colonies. Ces liens, construits au cours des décennies de domination coloniale ont quand même persisté après l’indépendance et a fourni un environnement bénéfique pour les deux parties, nous, Africains, profitant de la protection française, du soutien militaire et sécuritaire sans oublier l’aide étrangère et eux les Français, profitant de nos matières premières et de la mainmise dans notre politique économique.

France-Afrique

Nos systèmes et méthodes gouvernementaux, ont été copiés sur les structures françaises, et beaucoup le sont encore. Le français est souvent la langue officielle dans plusieurs pays africains. Ces facteurs garantissent la continuité de l’influence française après l’indépendance dans de nombreuses de nos sociétés africaines. 

Nos dirigeants amassent souvent des fortunes puis les transforment en propriétés immobilières et autres holdings en France et ailleurs en Europe et dans le monde. Pendant ce temps, la France bénéficie de dirigeants qui leur donnent carte blanche sur nos ressources naturelles, aux marchés d’exportation et d’une liberté d’action tacitement accordée.

Il faut noter que le faux départ a eu lieu durant les époques coloniales ; nos dirigeants étaient culturellement très imprégnés des traditions françaises, et certains occupant même des postes en France, comme par exemple Houphouët-Boigny qui servait dans le gouvernement français et l’ascension du président sénégalais Senghor au sommet de la société française jusqu’à son élection à l’Académie française.

Le modèle France-Afrique a bien fonctionné pendant des décennies, sous la tutelle du légendaire et controversé Jacques Foccart, conseiller Afrique de Gaulle, Pompidou, et, brièvement, François Mitterrand et son fils Jean-Christophe et Jacques Chirac. Pendant de nombreuses années, le conseiller Afrique à la présidence n’a pas rendu compte au conseiller diplomatique du président, mais directement au président, bénéficiant ainsi d’un statut égal ou peut-être même supérieur à celui du conseiller diplomatique. 

Rien n’est éternel.

À la fin du 20e siècle, on assiste à un paysage mondial en mutation et le modèle France-Afrique commence à avoir du mal à s’adapter. Les Africains avaient commencé à beaucoup voyager et ils ont vu d’autres parties du monde et ont commencé à démystifier la France. Il y a aussi l’aspect de la globalisation qui a exposé nos sociétés aux films, modes, sports, musique et littérature non français et l’Amérique du Nord a bénéficié d’un avantage dans ce domaine. Conséquemment, les Africains francophones ont commencé à perdre leur tendance à considérer la France comme leur modèle. Bref, France-Afrique a commencé à être victime de plusieurs effets de la mondialisation.

Pour la France, le coût du maintien de France-Afrique a commencé à devenir moins proportionné à ses rendements, à la fois politique et économique. Ayant changé de stratégie sur sa présence militaire en Afrique, cela a augmenté le coût de maintenir sa présence militaire dans le monde. Entre cela et une population vieillissante, la France commence à sentir le poids économique et le privilège français est menacé en Afrique.

Sur le plan politique, les problèmes en Afrique deviennent plus complexes et plus coûteux à gérer pour la France. Autrefois considérée comme joyau de la couronne de France-Afrique, elle avait commencé à sombrer dans le chaos après la mort de l’un des plus grands défenseurs et bénéficiaires de France-Afrique, Houphouët-Boigny. À titre d’exemple, l’opération Licorne a coûté à la France environ 250 millions d’euros par an, sans donner de résultats satisfaisants.

France-Afrique a accordé des privilèges à la France, mais portait aussi un fardeau d’attentes devenu plus difficile à assumer. Tout le monde a reconnu la primauté de la France dans certaines parties de l’Afrique, mais cela a créé des espérances que lorsque des problèmes surgissent, les Français s’en chargeront. La France a longtemps été capable et désireuse de relever ces défis quand tout le monde a accepté cette réalité, mais ce n’est plus le cas. France-Afrique a parfois été une arme à double tranchant, certains, y compris des Africains, voulant que la France intervient avec force lorsque des problèmes surgissent, mais avec d’autres, heureux d’accuser la France d’agir unilatéralement ou en tant que néocolonialiste quand elle le fait. 

Cependant, le gouvernement de Jacques Chirac était conscient que le modèle France-Afrique stagnait et il a tenté néanmoins, à préserver la façade du modèle. Le modèle commençait à mourir avec le président Nicolas Sarkozy qui a voulu changer les choses. Il voulait normaliser les relations entre la France et ses anciennes colonies et voulaient que les Africains se prennent en charge sans l’aide de la France.

Sur papier, Sarkozy avait éliminé la position de Monsieur Afrique et a nommé Jean-David Levitte comme conseiller diplomatique et Bruno Joubert comme adjoint de ce dernier. La position de Monsieur Afrique n’existe plus officiellement et les conseillers ne rendent plus compte directement au président, mais plutôt au conseiller diplomatique.

Quand Macky Sall ressuscite la Françafrique

« Élu le 28 mars 2012, le nouveau président sénégalais Macky Sall s’est finalement refusé à exiger le paiement d’un loyer par la France, décidant que la France pourrait bénéficier du site de Rufisque à titre gracieux, et a signé le traité le 18 avril 2012 à l’occasion de sa visite en France ». République Française.

Vu que les pays africains ont demandé et ont lutté pour leur indépendance avant d’avoir eu une politique commune de défense, il était facile pour les anciennes puissances coloniales d’exploiter cette lacune. Elles en ont profité pour signer des accords de défense militaire. Pour demeurer une puissance occidentale, la France s’est assurée de maintenir les rapports avec ses anciennes colonies. François Mitterrand disait : « Sans l’Afrique, il n’y aura pas d’histoire de France au 21e siècle ». La France a garanti l’aide, l’assistance et les accords de défense en cas de troubles intérieurs, elle a même utilisé ces accords pour établir des bases militaires dans plusieurs pays africains. Presque toutes les anciennes colonies sont liées à la France par un accord de défense. Par ce biais, on note le comportement paternaliste pour renforcer son influence sur les anciennes colonies et leur faire croire qu’ils ont besoin de la France.

Sous Macky Sall, les entreprises françaises font de bonnes affaires, et même de très bonnes affaires, en Afrique de l’Ouest et au Sénégal plus particulièrement : Eiffage est le concessionnaire de la première autoroute à péage du pays qui relie le centre de la capitale Dakar au nouvel aéroport international Blaise Diagne et la seconde ville du pays Thiès ; Bolloré est le concessionnaire du port de Dakar ; Alstom s’est occupée du Train Express Régional qui reliera Dakar, sa banlieue et l’aéroport international Blaise Diagne ; Auchan a commencé à déployer un réseau de grandes surfaces qui pénètrent les principaux quartiers chics et populaires de Dakar ; Suez a raflé le contrat d’affermage relatif à la gestion de l’hydraulique urbaine et périurbaine, Total a reçu en mai 2017 la licence de prospection et d’exploitation des blocs de pétrole et de gaz les plus prometteurs du pays.

À l’ère où nous sommes, on ne devait plus parler de France-Afrique, mais plutôt de partenariat gagnant -gagnant. Pourquoi nos dirigeants n’assurent pas notre propre défense afin de pouvoir enfin oser dire non quand il faut dire non. Quand un pays assure votre défense, et qu’elle paie les violons, elle va choisir la musique. Il faut oser couper le cordon ombilical et grandir, mais pour le faire, il faut respecter les étapes à suivre afin de devenir une nation souveraine.

Mohamed Dia

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