L’idée de dépasser la condition humaine n’est pas nouvelle. Elle trouve ses racines dans des mythes et des récits anciens : Prométhée volant le feu des dieux ou le Golem façonné par l’homme. Cependant, c’est au XXᵉ siècle que le concept prend une tournure scientifique, porté par des figures comme Julian Huxley, frère d’Aldous Huxley, qui introduit le terme « transhumanisme » en 1957. Aujourd’hui, le mouvement est soutenu par des penseurs tels que Ray Kurzweil, directeur de l’ingénierie chez Google et prophète de la « singularité technologique », et par des entrepreneurs comme Elon Musk, fondateur de Neuralink, qui cherche à connecter le cerveau humain à l’intelligence artificielle (Ia). Leur vision : un futur où la biologie, la robotique et l’intelligence artificielle fusionneraient pour permettre à l’homme de devenir un « post-humain », un être augmenté et libéré des contraintes naturelles.
Le transhumanisme repose sur plusieurs idées centrales : 1. L’amélioration de l’humain : Grâce à des technologies comme les implants cérébraux, les prothèses bioniques ou encore l’ingénierie génétique (Crispr), il serait possible de décupler les capacités physiques, intellectuelles et sensorielles des individus.
2. L’immortalité ou l’allongement radical de la vie : Les recherches sur le vieillissement, menées par des entreprises comme Calico (soutenue par Google), visent à ralentir, voire inverser, les processus biologiques qui mènent à la mort.
3. La fusion avec l’intelligence artificielle : En intégrant des machines à nos cerveaux, nous pourrions étendre nos capacités cognitives, accéder instantanément à des bases de données ou encore interagir avec des systèmes complexes de manière quasi-télépathique.
4. La singularité technologique : Cette théorie, défendue par Kurzweil, postule qu’une explosion de l’intelligence artificielle entraînera un point de non-retour, où l’humain, dépassé par les machines, devra fusionner avec elles pour survivre.
Les partisans du transhumanisme y voient une chance unique pour l’humanité. L’augmentation des capacités humaines pourrait résoudre des problèmes majeurs comme les handicaps, les maladies incurables ou le déclin cognitif lié à l’âge. La technologie pourrait démocratiser l’accès au savoir et permettre à chacun de dépasser ses limites biologiques. Inquiétudes Cependant, ces visions utopiques ne sont pas sans provoquer des inquiétudes.
D’abord, le transhumanisme soulève des questions sociales majeures. Si les technologies pour « augmenter » l’humain restent coûteuses, qui en bénéficiera ? Le risque d’une fracture entre « augmentés » et « non-augmentés » pourrait exacerber les inégalités, créant une élite quasi-surhumaine face à une masse désavantagée. Ensuite, la fusion avec l’intelligence artificielle pose des problèmes éthiques. Qui contrôlera ces systèmes ? Quelle sera la frontière entre l’homme et la machine ?
Certains craignent une perte d’identité humaine, où nos pensées, influencées par des algorithmes, ne nous appartiendraient plus totalement. D’autres critiques, comme le philosophe François-Xavier Bellamy, dénoncent une vision « techniciste » du monde, où l’homme serait réduit à une machine à optimiser, oubliant sa part d’imperfection, mais aussi de profondeur existentielle. « Nous ne sommes pas des algorithmes », rappelle-t-il, soulignant l’importance de conserver une réflexion éthique sur nos choix technologiques. Enfin, il y a la question écologique. L’énergie nécessaire pour faire fonctionner ces nouvelles technologies pourrait aggraver la crise climatique, plaçant les besoins d’une élite transhumaniste au-dessus des priorités collectives de l’humanité.
