samedi, octobre 5, 2024
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Le Sénégal sous perfusion permanente du FMI et la Banque Mondiale

par pierre Dieme

Pourquoi ces emprunts tous azimuts si les caisses du Trésor public n’étaient pas vides ? Le pays a tout de même levé la semaine dernière 775 millions d’euros en Eurobonds dont les 70 % ont servi… à rembourser un précédent Eurobond

350 milliards de Fcfa ont été accordés hier par le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) à notre pays dans le cadre de la facilité de crédit. Vendredi dernier, déjà, le Sénégal avait reçu de la Banque mondiale près de 150 milliards de frs. Selon le ministre des Finances et du Budget, 484 milliards de frs sont attendus de la Banque mondiale au courant de l’année fiscale 2021. Un montant record. Certes, au plus haut niveau de l’Etat, l’on nie une mise sous ajustement structurel de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Mais au rythme de perfusion financière effrénée noté ces derniers temps de la Banque mondiale et du FMI, on ne peut écarter une telle hypothèse de mise sous tutelle de notre pays quand on sait que les prêts de ces institutions sont liés. C’est-à-dire que l’emprunteur n’est pas libre de leur utilisation. Et puis, si les caisses du Trésor public n’étaient pas vides, le Sénégal recourrait-il tous azimuts à ces emprunts ? Il convient de ne pas oublier, en effet, que notre pays a levé la semaine dernière 775 millions d’euros en Eurobonds dont les 70 % ont servi… rembourser un précédent Eurobond !

Les autorités ne veulent pas l’admettre mais c’est la triste réalité. Le Sénégal est quasi-retourné sous la tutelle des institutions de Bretton Woods. Le Gouvernement peine à faire redémarrer son économie qui se remet difficilement des effets de la Covid-19. Malgré le recours intempestif au marché financier domestique, c’est-à-dire sous-régional de l’Uemoa, et tout dernièrement aux Eurobonds (508 milliards de frs), notre pays confronté à la demande sociale frappe avec insistance aux portes du FMI et de la Banque mondiale. Ce lundi 07 juin, le Conseil d’administration du FMI a encore volé au secours du Sénégal. Une nouvelle perfusion financière d’un montant de 350 milliards a encore été obtenue de l’institution de Bretton Woods.

Elle survient après les 150 milliards (dont une partie sous forme de don) décrochés ce vendredi par le ministre des Finances et du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, auprès de la Banque mondiale pour le programme gouvernemental « accélérer la compétitivité et la création d’emplois » et le projet de gestion des eaux fluviales et d’adaptation au changement climatique. Très prochainement le Sénégal recevra de cette même institution de Bretton Woods pour l’acquisition de vaccins contre la Covid-19, 72 milliards de francs CFA dont la moitié, soit 36 milliards, sera sous forme de don, donc sans remboursement. A cela s’ajouteront des ressources pour le Cadastre et la sécurisation foncière à hauteur de 80 millions de dollars, soit 43 milliards de francs CFA dont la moitié sera un don ; 15,7 millions de dollars, soit 8,4 milliards de francs CFA en soutien au pastoralisme. La Banque mondiale va aussi appuyer le Sénégal à hauteur 59 milliards de frs pour le programme de bourses de sécurité familiale. Sur ce montant près de 38 milliards en don.

Autrement dit, pour aider ses citoyens les plus démunis et vulnérables, et donc faire du social, le Sénégal va s’endetter ! ce même si, encore une fois, une partie des sommes obtenues ne sera pas remboursable. Mais quand même, faire du social alors qu’on n’en a pas les moyens, quelle curieuse conception de l’économie… « Au total, le Sénégal conclura 898 millions de dollars, soit environ 484 milliards de francs CFA de financement avec la Banque mondiale durant l’année fiscale en cours, un montant record » s’était réjoui — plutôt que d’en pleurer – Abdoulaye Daouda Diallo devant Nathan BELETE, Directeur des Opérations de la Banque mondiale au Sénégal.

350 milliards de frs pour soutenir la reprise « forte » et créatrice d’emplois

L’accord de financement d’une durée de 18 mois, conjugué à l’instrument de coordination de la politique économique, fournira un point d’ancrage des politiques économiques pour la prochaine phase de la riposte des autorités face à la COVID-19 et soutiendra une reprise forte et créatrice d’emplois. « Bien que l’horizon à moyen terme demeure prometteur, les perspectives macroéconomiques pour 2021 sont sujettes à des risques en raison de la prolongation des effets de la pandémie et de la hausse des prix des produits de base » a indiqué le Gouvernement dans un communiqué de presse.

 « La pandémie de COVID-19 a frappé l’économie sénégalaise de plein fouet et mis de nombreux ménages en difficulté, en particulier ceux qui travaillent dans l’économie informelle. La croissance en 2020 est estimée à 1,5 %, grâce à des récoltes record, malgré une sévère contraction dans les secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, du tourisme et des transports. La mise en œuvre efficace d’un programme de résilience économique et sociale (PRES) par le gouvernement a contribué à renforcer le secteur de la santé et à atténuer les pertes de revenus des ménages et des entreprises. Une reprise timide est attendue en 2021 avec une croissance de 3,7 % » souligne le document du FMI. Et de poursuivre en ajoutant que « pour assurer la transparence et rendre compte des dépenses liées à la pandémie, les autorités ont publié des rapports trimestriels d’exécution budgétaire, qui détaillent l’emploi des ressources correspondantes. Par ailleurs, et le rapport du comité de surveillance du fonds Force COVID-19 a été finalisé.

 L’audit annuel des procédures de marchés publics, y compris les procédures liées aux dépenses pour la COVID-19, sera achevé fin juin et la Cour des comptes publiera en octobre son rapport sur l’exécution de la loi de finances 2020 ». Les résultats du programme appuyé par l’ICPE demeurent positifs et les objectifs du programme, à savoir assurer une croissance forte et inclusive tout en préservant la stabilité macroéconomique, restent pertinents. La collaboration entre le FMI et le Sénégal dans le cadre de l’ICPE se poursuivra en parallèle avec les nouvelles modalités de l’accord de confirmation et de la FCC jusqu’à fin 2022.

À l’issue de la séance consacrée à l’examen par le conseil d’administration de la troisième revue du programme appuyé par l’ICPE et des demandes d’accord de confirmation et d’accord au titre de la FCC présentées par le Sénégal, M. Mitsuhiro Furusawa, directeur général adjoint et président par intérim, a indiqué que « la pandémie de COVID-19 a eu de graves retombées sur l’économie sénégalaise, lesquelles ont été atténuées par la riposte vigoureuse des autorités. Les perspectives macroéconomiques à court terme se sont détériorées, notamment en raison de la longue durée de la pandémie de COVID-19, de la hausse des cours des produits de base et de l’augmentation des besoins de financement pour le déploiement des vaccins. Une reprise progressive est prévue en 2021, même si elle est assujettie à des risques, dont celui d’une troisième vague de COVID-19 ». Nous, au-delà de cette langue de bois chère aux institutions de Bretton Woods, ce qu’on voit, audelà de cette frénésie de recours à des emprunts tous azimuts, c’est que les causses de l’Etat sont vides, désespérément vides. Et que l’endettement du pays atteint des sommets !

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