Ne pas aller dans le sens de l’apaisement auquel convie le religieux serait non seulement contradictoire mais suicidaire. Ne pas le faire, c’est se mettre à dos un allié de taille qui avait avalisé par consentement tacite et explicite à la fois le soulèvement populaire de ces derniers jours. Les religieux avaient béni la révolte parce que Macky s’était entêté et n’avait pas tenu compte de leur avis.
On ne peut pas reprocher à Macky de snober le religieux si soi-même on fait la même chose. Le M2D a donc déjoué ce piège.
Nous sommes dans une « république religieuse ». Pour l’instant en tout cas.
Et, il faut toujours partir du réel si l’on veut changer les choses. Le poids du religieux dans certaines décisions politiques reste encore énorme. Le colonisateur a très tôt compris cette donnée. Nous sommes un 12 mars et curieusement le 12 mars passé, je rappelais le recours au religieux par l’administration coloniale pour venir à bout de certaines crises et notamment de certaines épidémies. C’était au début de Covid-19. Six mois plus tard, le ministre de Santé, au début réticent, avait fini par reconnaître l’importance du religieux comme « relais communautaire » efficace capable de freiner la pandémie.
Voir post ici: https://bit.ly/30Gm8oM
Il s’agit maintenant de faire un bon usage de cette médiation du religieux. Je crois que l’instauration de l’Etat de droit que nous appelons de nos vœux et le respect des principes démocratiques que les manifestants (les terroristes, selon le ministre de l’intérieur) scandaient dans tout le Sénégal, passeront par cette médiation du religieux.
Faire porter une plateforme revendicative par le religieux comme contrepartie de l’apaisement est une excellente chose. Macky ne fera jamais l’erreur, lui qui est groggy et isolé en ce moment, de refuser une seconde fois la médiation du religieux. Il sera tenu d’accepter ces doléances qui, à mon avis, devront être étoffées pour épouser l’ensemble des désidératas des manifestants, ou en cas tout cas ses points saillants. C’est à cette condition que la révolte des jeunes aura porté ses fruits.
En prenant en compte ces doléances et en libérant les institutions prises en otage, Macky pourra, lui qui est politiquement et moralement anéanti, se refaire une virginité et finir en beauté, en 2024, une gouvernance controversée.
Pr Khadim Ndiaye
📷 KhaLifa HuSsein
