Il était la silhouette discrète derrière chaque président, la figure immuable au cœur du pouvoir. Ministre d’État et chef du protocole de la Présidence de la République du Sénégal pendant plus de quarante ans, Bruno Diatta était un pilier de l’État, une icône de la continuité républicaine. Sa vie fut une leçon de dévouement absolu, de discrétion et de professionnalisme.
Disparu le 21 septembre 2018, ce grand commis de l’État a incarné, pendant des décennies, la continuité et la dignité de la République du Sénégal.
De Léopold Sédar Senghor (1978-1980) à Macky Sall (2012-2018), en passant par Abdou Diouf (1980-2000) et Abdoulaye Wade (2000-2012), il a traversé les alternances politiques en restant fidèle à sa mission : incarner la dignité et la solennité de l’État. Sa longévité exceptionnelle s’explique par sa capacité à se tenir en retrait des jeux politiques, sa loyauté n’allant pas à un homme, mais à la République elle-même. Il était le dépositaire des secrets du pouvoir, le garant des traditions, l’homme qui murmurait à l’oreille de tous les chefs d’État sénégalais.
Sa stature longiligne, son élégance naturelle et sa voix posée ont marqué les esprits. Il était, pour beaucoup, un homme d’une rigueur inflexible, capable de gérer des crises protocolaires avec une maîtrise parfaite et de régler les moindres détails pour que les institutions de la République fonctionnent sans accroc. Le mot « impeccable » revenait sans cesse pour le décrire.
Un chevalier de l’ombre de la République
Connu pour son silence et son aversion pour la lumière médiatique, Bruno Diatta a incarné la discrétion comme un principe de vie. Il ne s’exprimait que très rarement en public, laissant son travail parler pour lui. Son calme olympien et sa capacité à rester dans l’ombre des grands événements en ont fait une figure mystérieuse et respectée. Il était la preuve vivante qu’on peut exercer une influence capitale sans jamais chercher la reconnaissance.
Né le 22 octobre 1948 à Saint-Louis, Bruno Diatta a vécu entre deux régions : la Casamance naturelle, précisément Oussouye, terre de ses aïeux diolas, et Saint-Louis, son lieu de naissance. Il était le fils d’Édouard Diatta, un ancien ministre du Travail avant l’indépendance. Il a été diplômé et major de sa promotion à l’École nationale d’Administration (ENA) du Sénégal. En dehors des cérémonies officielles, il était un homme simple, taquin et un passionné de football.
Les mots des différents présidents et hauts dignitaires après sa mort ont été unanimes. Il a été salué comme un « grand serviteur de l’État ».
Bruno Diatta est décédé le 21 septembre 2018, à 69 ans, plongeant le pays dans le deuil. C’est le président Macky Sall qui a annoncé sa disparition en lui rendant un hommage poignant, saluant un homme qui a porté « jusqu’au bout la culture d’État ».
En reconnaissance de ses bons et loyaux services, et pour l’offrir en exemple aux générations actuelles et futures, la Salle du Conseil des ministres et le Grand Amphithéâtre de l’École nationale d’Administration portent son nom.
Djibril DIAO