.
vendredi, avril 19, 2024
.
Accueil A la Une Avis de tempĂȘte

Avis de tempĂȘte

par pierre Dieme

Analysant le conflit entre la Russie et l’Ukraine aux relents Ă©conomiques dĂ©sastreux, les Ă©conomistes et universitaires Mor Gassama et Meissa Babou dressent un tableau sombre pour les mois Ă  venir, si la crise perdure

Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!

Le conflit armĂ© qui oppose depuis trois semaines dĂ©jĂ  deux gĂ©ants du secteur agricole, Ă  savoir la Russie et l’Ukraine, qui totalisent 29% des exportations mondiales de cĂ©rĂ©ales prĂ©sage des lendemains incertains, principalement pour des pays Ă©mergents comme le SĂ©nĂ©gal. Entre hausse envisagĂ©e des prix des produits importĂ©s (blĂ©, maĂŻs, pĂ©trole, mĂ©taux etc.) et probable inflation galopante, les Ă©conomies Ă  revenus intermĂ©diaires sont sur le qui-vive. Analysant ce conflit aux relents Ă©conomiques dĂ©sastreux, des Ă©conomistes et universitaires, Ă  savoir Mor Gassama et Meissa Babou, dressent un tableau sombre pour les mois Ă  venir, si la crise perdure.

MEISSA BABOU, ECONOMISTE ET ENSEIGNANT A L’UCAD : «L’impact sera rĂ©el, aprĂšs l’épuisement du stock»

Le risque de voir certaines entreprises fermer ou rĂ©duire drastiquement leurs effectifs et leurs productions est probable, si la crise Ukrainienne perdure encore. Ce qui ne sera pas sans consĂ©quences dans la «croissance Ă©conomique», a fait savoir l’économiste et enseignant Ă  l’UniversitĂ© Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar, Meissa Babou, analysant la guerre en Ukraine.

La crise Ukrainienne est Ă  prendre au sĂ©rieux par tous les Etats, singuliĂšrement ceux dits Ă©mergents comme le SĂ©nĂ©gal. Parce que, si l’on se fie Ă  l’analyse de l’économiste et enseignant Ă  l’UniversitĂ© Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar, Meissa Babou, le pire n’est pas Ă  Ă©carter si Vladimir Poutine s’entĂȘte Ă  aller jusqu’au bout de sa logique. «Nous risquons de vivre une inflation massive et globale parce que tous les secteurs d’activitĂ©s seront impactĂ©s», a prĂ©venu le Pr Babou. Le nombre de produits venant de l’ancienne Union des rĂ©publiques socialistes soviĂ©tiques (Urss) utilisĂ©s dans les secteurs d’activitĂ©s va «poser un problĂšme d’accĂšs Ă  des matiĂšres miniĂšres et ou agricoles dans le monde», soutient l’économiste. A fortiori pour une Ă©conomie comme la nĂŽtre qui est un modĂšle d’importation. Ce qui veut dire que si les autres souffrent, ils peuvent tout de mĂȘme se contenter d’un avantage de pĂ©trole ou de produits agricoles comme le riz au Burkina Faso. Tout le contraire pour le SĂ©nĂ©gal, pour y faire face.

Pour s’en convaincre, le Pr Babou illustre ses propos par la question du blĂ© et du maĂŻs, «deux produits utilisĂ©s dans la fabrication d’aliments de bĂ©tail». A ce niveau, il y a fort Ă  craindre parce que le risque «d’approvisionner le marchĂ© est tangible», soutient Meissa Babou. Relativement au pĂ©trole dont le baril s’offre, maintenant sur le marchĂ© international, Ă  prĂšs de 130 dollars, il souligne que cela n’augure rien de bon. D’ailleurs, les prĂ©visionnistes les plus pessimistes y entrevoient jusqu’à 300 dollars, si la crise se prolonge des semaines encore. Ce qui, sans doute, ne sera pas chose facile pour l’économie mondiale. VoilĂ  pourquoi, «il faut s’attendre au pire (catastrophe Ă©conomique)», alerte l’économiste. MĂȘme probabilitĂ© sur les mĂ©taux venant d’Ukraine comme les piĂšces d’avion, les piĂšces de portable, le fer que nous utilisons dans nos constructions, entre autres produits. Il en est de mĂȘme pour les cimentiers qui vont «revoir Ă  la hausse les prix du produit parce que le charbon utilisĂ© reprĂ©sente prĂšs de 70% de leur coĂ»t de production», fait savoir l’économiste.

«NOUS SERONS VRAIMENT EN PLEINE GUERRE, APRES L’EPUISEMENT DU STOCK»

Quid de la Senelec pour l’alimentation des centrales, voire mĂȘme des consommateurs de produits pĂ©troliers Ă  la pompe ? Heureusement, dira-t-il, que «nous roulons actuellement avec des stocks. Mais l’impact sera mesurable dans un mois et demi, lorsque nous aurons Ă©puisĂ© tout le stock», prĂ©vient l’enseignant Babou. «Nous serons vraiment en pleine guerre, aprĂšs l’épuisement du stock», relĂšve l’économiste. Les prix qui sont affichĂ©s aujourd’hui attendent des commandes qui seront livrĂ©es dans un mois. Ce que nous voyons Ă  l’extĂ©rieur comme Ă©tant des variations de gauche vont «nous impacter dans un dĂ©lai raisonnable de deux mois», ajoute-t-il. Le pire maintenant, «c’est de voir des entreprises Ă  l’arrĂȘt», prĂ©dit Pr Babou. Parce que si des produits comme le ciment et le fer augmentent, forcĂ©ment le secteur des Btp (bĂątiments et travaux publics) sera Ă  l’arrĂȘt. Par consĂ©quent, un sous-emploi, les pertes d’emplois seront notoires et considĂ©rables. Ce qui, inĂ©luctablement, va se rĂ©percuter sur bon nombre d’activitĂ©s de la vie Ă©conomique. C’est Ă©galement la mĂȘme chose dans le secteur de l’élevage. Aujourd’hui, l’aliment de bĂ©tail qui coĂ»tait 9000 FCFA est passĂ© Ă  21 000 FCFA. Et si demain, il venait Ă  coĂ»ter 30 000 FCFA, voire 35 000 FCFA ? Donc, «il est Ă  craindre qu’il n’y ait plus d’élevage», dresse l’économiste. PrĂ©sentement, le poulet qui coĂ»tait 2500 FCFA s’offre entre 3500 FCFA et 4000 FCFA. SubsĂ©quemment, il n’est pas Ă  Ă©carter le risque de voir certaines entreprises fermer ou rĂ©duire drastiquement leurs effectifs et leurs productions. Ce qui, aux yeux de l’économiste Meissa Babou, ne sera pas sans consĂ©quence dans la croissance Ă©conomique. Et, pendant ce temps, entrevoit le professeur, «l’Etat sera contraint de contracter des prĂȘts pour faire face Ă  ses charges quotidiennes».

MOR GASSAMA, ECONOMISTE ET ENSEIGNANT-CHERCHEUR A L’UCAD : « La vĂ©ritĂ© des prix s’appliquera aprĂšs les LĂ©gislatives »

La hausse des prix sur les produits n’est pas encore trĂšs ressentie parce que le gouvernement a consenti en subventionnant les produits jusqu’à l’épuisement du stock. Toutefois, prĂ©vient l’économiste et enseignant-chercheur Ă  l’Ucad, Mor Gassama, il n’est pas du tout Ă  Ă©carter la vĂ©ritĂ© des prix si la crise Ukrainienne venait Ă  perdurer aprĂšs les Ă©lections lĂ©gislatives.

L’invasion Russe en Ukraine ne sera pas sans consĂ©quences dans l’économie mondiale comme l’illustre bien la posture des institutions de Bretton Woods (Banque mondiale, Fonds monĂ©taire international) qui se mobilisent pour dĂ©bloquer des fonds en urgence. InterrogĂ© sur les incidences Ă©conomiques sur certains secteurs d’activitĂ©s Ă©conomiques, l’économiste et enseignant-chercheur Ă  l’UniversitĂ© Cheikh Anta Diop de Dakar, Mor Gassama, est d’avis que « la flambĂ©e des prix du baril du pĂ©trole, du blĂ© et du maĂŻs due Ă  la crise ukrainienne va incontestablement impacter la structuration des prix de certains produits comme le carburant et le pain chez nous ».

A en croire l’économiste : « Avec le stock disponible (1mois et demi Ă  2 mois), le gouvernement parvient encore Ă  maintenir les prix ». Mais si la situation perdure encore jusqu’aprĂšs « l’épuisement du stock, il serait difficile de vendre au mĂȘme prix sauf Ă  la condition que l’Etat dĂ©cide de subventionner davantage ». Convaincu de la logique du marchĂ©, il laisse entendre qu’il n’est pas Ă  Ă©carter « une tension sur les prix ». Et sous ce rapport, fait-il savoir : « L’on est sensĂ© suivre l’évolution ». Toutefois, malgrĂ© cette incidence, il relĂšve que les pouvoirs publics disposent de ressort de matelas pour limiter ou alors minimiser les insoutenables assauts de l’économie. « Il se trouve que les pouvoirs publics disposent de leviers Ă©conomiques pour retarder voire les bloquer surtout en cette pĂ©riode prĂ©-Ă©lectorale », avance l’économiste. PersuadĂ© que les tenants du pouvoir mesurent bien que toute dĂ©cision sociale Ă  fort impact Ă©conomique ne leur ferait que du bien politiquement, il admet que « C’est trĂšs difficile, voire suicidaire du moins pour un Etat d’augmenter ou de revoir les prix Ă  la hausse Ă  la veille des Ă©lections lĂ©gislatives ». C’est pourquoi, dans ce cas de figure, l’Etat serait plus enclin Ă  « fournir des efforts exceptionnels pour contenir toute sorte de hausse », croit-il savoir. Et ce, entendant qu’on dĂ©passe les Ă©lections afin d’appliquer « la rĂ©alitĂ© des prix ».

Jean Pierre MALOU 

Tu pourrais aussi aimer

Web TV

Articles récentes

@2024 – tous droit rĂ©server.Â