Les violents affrontements qui ont éclaté hier, mardi 2 décembre 2025 à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) ont engendré 16 blessés dont 6 graves chez les étudiants et 4 blessés parmi les forces de l’ordre. Ces heurts, qui ont également occasionné d’importants dégâts matériels, font suite à la demande de réquisition de la part du Conseil académique pour autoriser l’entrée de la police dans le campus.
Malgré l’annonce par la direction des bourses du début des paiements ce même jour, les étudiants sont restés déterminés et ont refusé de capituler. La grève du Collectif des amicales de l’Ucad s’est intensifiée, dégénérant presque toute la journée en une confrontation violente avec les forces de l’ordre.
« La situation reste tendue à l’Ucad entre étudiants et forces de l’ordre, suite à la sortie du ministre de l’Enseignement supérieur Daouda Ngom annonçant le début des paiements aujourd’hui, (hier, mardi), Mais, nous précisons que ces paiements concernent l’année académique 2025 -2026. Or, nous réclamons le paiement des année-2024-2025, soit 12 mois d’arriérés de bourses. Donc, cette communication du ministre entraine une confusion et laisse croire à une manipulation de l’opinion », a laissé entendre le président de la Commission sociale de la FST.
Cette intense journée d’hostilités a eu des conséquences directes et graves sur la santé des personnes impliquées. Selon des informations de « L’Observateur », au moins quatre policiers ont été blessés. Les images circulant sur les réseaux sociaux montrent d’ailleurs deux agents secourus par leurs collègues. Ces blessures s’expliqueraient, d’après la même source, par l’utilisation de lance-pierres électroniques ou pistolets à billes par les étudiants. Toutefois, chez les étudiants, le bilan est encore plus élevé, avec plus d’une quinzaine de blessés annoncés, dont plusieurs se trouveraient dans un état grave.
L’affrontement, marqué par des jets de pierres et des grenades lacrymogènes, a plongé l’Ucad et ses alentours dans une vive tension, provoquant des embouteillages monstres sur la Corniche Ouest. Les forces de l’ordre sont parvenues à repousser les grévistes et à rétablir le trafic, mais les étudiants avaient déjà ouvert plusieurs fronts, y compris à l’intérieur du campus.
Face à l’ampleur des dégâts matériels notamment des épaves de véhicules brûlées à l’intérieur de l’Université et des atteintes à la sécurité des personnes, le Conseil académique de l’Ucad s’est réuni hier, mardi en visioconférence. Dans son communiqué, le Conseil pointe du doigt des incidents qui ont compromis la sécurité et menacé le bon fonctionnement des activités d’enseignement. Il a ainsi autorisé le Recteur, Alioune Badara Kandji, à requérir le concours des forces de l’ordre pour assurer la sécurité et la protection des biens sur le campus.
Cependant, cette réquisition formelle, indispensable pour légitimer l’entrée des forces de l’ordre, n’avait pas été signée en début de soirée. Si le Recteur formalise cette demande aujourd’hui, le dispositif sécuritaire actuellement en place composé d’éléments de la police du Point E et du GMI en veille réactive sera chamboulé. La police aura alors le droit d’entrer à l’intérieur de l’Université, renforçant considérablement ses moyens humains et matériels en fonction de l’appréciation de la situation sur le terrain.
En attendant, l’Intersyndicale des personnels administratifs, techniques et de service des universités et centres universitaires du Sénégal (PATS) ont dénoncé la tension et ont invité le Recteur à prendre toutes les mesures pour protéger la santé physique et mentale des travailleurs, rappelant que des collègues ont été victimes d’agressions morales et physiques sur les sites.
Wally Faye, responsable du collectif des étudiants, s’est exprimé sur la situation à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), dénonçant la présence des forces de l’ordre sur le campus et apportant des éclaircissements sur le bilan des blessés.
« Hier, des guides religieux, notamment Thierno Amadou Ba, Khalife général de Bambilor, et Serigne Moustapha Thialal, ainsi que le collectif des anciens délégués, sont venus nous rencontrer tard dans la nuit pour nous demander de leur accorder 48 heures afin qu’ils puissent régler le problème », a-t-il indiqué, avant de poursuivre, « de notre côté, nous avons posé nos conditions », a notifié Wally Faye sur le plateau de Tfm . « Nous voulons bien leur accorder ces 48 heures à condition que les policiers qui se trouvent aux alentours des facultés quittent les lieux ». D’ailleurs, les affrontements ont repris aujourd’hui ( ce mercredi).
L’étudiant a insisté sur un point qu’ils ont toujours réfuté, c’est « la violation des franchises universitaires ». « Il est constaté qu’il y a des chars de policiers un peu partout aux alentours des facultés et leur seule présence peut créer des tensions », a-t-il ajouté, précisant qu’il existe une « sensibilité » entre la communauté estudiantine et les forces de l’ordre.
Concernant les blessés notés suite aux affrontements, Wally Faye a fait savoir que ce bilan est le total des deux semaines de heurts. Il a révélé que certains des blessés sont en soins à l’hôpital de Fann et les autres ont été évacués dans d’autres centres de santé, car le service médical du Coud dit ne pas pouvoir prendre en charge tous les blessés, surtout les cas critiques.
Selon M. Faye, « le président de l’amicale de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines (FLSH) fait partie des blessés et se serait cassé la main ». Ces blessures seraient dues, selon lui, à l’impact de grenades lacrymogènes jetées par les policiers pour certains, et à des balles blanches pour d’autres. « Nous sommes en train de collecter les preuves. Une fois que ce sera fait, on pourra peut-être envisager de déposer plainte », a-t-il annoncé.
Il a également souligné que tous les blessés sont évacués à l’hôpital par les membres du collectif, et c’est le collectif qui paie les frais médicaux avec ses propres moyens.

