Face à une dette publique projetée à 132 % du PIB en 2025 et à des marges budgétaires fortement contraintes, le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, appelle à une reconfiguration profonde du modèle de développement national. Intervenant hier, vendredi, 14 novembre, à Dakar, lors d’une table ronde consacrée à la stimulation de l’emploi par le renforcement du capital humain, il a plaidé pour une libération des capacités d’initiative du secteur privé ainsi qu’un approfondissement des partenariats stratégiques dans les secteurs porteurs.
Selon le ministre, l’ampleur des besoins économiques et sociaux, conjuguée à un haut niveau d’endettement, impose une transformation structurelle de l’action publique. Il considère le développement du capital humain comme un levier essentiel pour dynamiser la création d’emplois, à travers l’amélioration de la productivité, le renforcement de la compétitivité des entreprises, la promotion de l’innovation et une meilleure adéquation des compétences aux exigences du marché du travail.
Dans cette perspective, Abdourahmane Sarr a insisté sur la nécessité d’accorder davantage de liberté économique au secteur privé afin d’ouvrir de nouveaux espaces de croissance. Cette vision s’inscrit pleinement dans la Stratégie nationale de développement (SND), qui place l’industrialisation et l’essor du secteur privé au cœur des priorités nationales. La politique industrielle repose sur quatre moteurs stratégiques : l’agroalimentaire, les industries extractives (hydrocarbures et mines), les industries manufacturières et les services à forte valeur ajoutée, incluant les industries créatives, le tourisme et le numérique.
La formation duale et la digitalisation comme leviers de transformation
Le ministre a souligné l’importance du développement de la formation duale, associant institutions académiques et entreprises, estimant qu’elle offre un potentiel décisif pour rapprocher les apprentissages théoriques des exigences opérationnelles. Cette approche devrait faciliter l’insertion professionnelle des jeunes diplômés.
Dans le secteur de la santé, Abdourahmane Sarr a préconisé des réformes incitatives visant à encourager l’implantation d’établissements privés — cliniques, pharmacies, laboratoires — afin d’améliorer l’accès aux soins sur l’ensemble du territoire. La modernisation des infrastructures sanitaires des pôles de développement reposera sur une utilisation accrue des Partenariats Public-Privé (PPP), permettant de combler les déficits d’équipement des structures publiques, notamment en imagerie et en analyses médicales.
Une gouvernance territoriale repensée
Le ministre a par ailleurs appelé à l’instauration d’un modèle de gouvernance tripartite associant les communautés, le secteur privé et les collectivités territoriales. Celles-ci devraient jouer un rôle renforcé dans la mise en œuvre de la politique nationale de santé communautaire, particulièrement en milieu rural, afin de consolider le réseau de soins de proximité et d’améliorer la prévention. En conformité avec le principe de primauté du local sur le sectoriel inscrit dans la SND, les collectivités sont également invitées à maintenir un dialogue constant avec les services déconcentrés de l’État lors de l’élaboration et de l’exécution des politiques éducatives et sanitaires.
Le numérique au service de l’inclusion sociale
Pour démocratiser l’accès à l’éducation et à la santé, le gouvernement mise résolument sur la transformation numérique. Dans le secteur éducatif, la digitalisation permettra de compenser le déficit d’établissements grâce à l’enseignement à distance, d’élargir l’accès aux ressources pédagogiques par des plateformes numériques et d’améliorer le suivi des performances des apprenants. Dans le domaine sanitaire, la transition numérique facilitera la généralisation des dossiers médicaux électroniques, le développement de la télémédecine et l’optimisation du fonctionnement des établissements publics grâce à l’intelligence artificielle.« La mise en œuvre de ces mesures permettra au Sénégal de capter pleinement son dividende démographique, condition indispensable au développement des moteurs de croissance identifiés et à l’amélioration de l’accès à un emploi décent », a conclu le ministre.
JEAN PIERRE MALOU

