À l’occasion du 8ᵉ Salon International des Mines (SIM 2025), tenu du 4 au 6 novembre à Diamniadio, le Sénégal a réaffirmé son ambition de bâtir une industrie minière nationale moderne, durable et inclusive. Le président Bassirou Diomaye Faye, dans un discours fort, a tracé les contours d’une stratégie ambitieuse inscrite dans l’Agenda de Transformation Vision 2050, où le secteur minier devient un levier de diversification économique et de prospérité partagée.
Longtemps perçu comme un simple réservoir de ressources brutes, le sous-sol sénégalais s’impose aujourd’hui comme l’un des piliers de la transformation structurelle du pays. Avec la Vision Sénégal 2050, l’État entend « allumer le moteur » d’une industrie de valorisation des matières premières, en plaçant la gouvernance, la création de valeur et l’innovation au centre de son action.
Un secteur stratégique au cœur de la Vision 2050
Lors du SIM 2025, le chef de l’État a rappelé les nouvelles orientations : « Nous voulons transformer le secteur minier en moteur de diversification, de stabilité et de prospérité au service de toutes les générations. Il ne s’agit plus seulement d’extraire nos richesses, mais de leur faire parler le langage du progrès, de la connaissance et du bien-être collectif. »
Cette vision s’inscrit dans une politique volontariste de révision du Code minier, engagée par le gouvernement pour instaurer une fiscalité plus équitable, mieux adaptée aux réalités du secteur, et garantir une redistribution plus juste des richesses. L’objectif est clair : que chaque gramme d’or, chaque tonne de phosphate ou de fer contribue directement au développement national et au bien-être des populations locales.
De la gouvernance à la création de valeur locale
La première étape de cette refondation passe par l’optimisation de la gouvernance et de la réglementation minière. Le gouvernement a lancé un processus de révision des contrats et des pratiques existantes, pour s’assurer qu’elles répondent désormais aux standards internationaux de transparence et de responsabilité sociale. Cette démarche vise à replacer l’État au centre de la régulation, tout en renforçant la confiance entre autorités, investisseurs et communautés.
En parallèle, le Service géologique national sera profondément renforcé – tant sur le plan humain que technique – pour mieux évaluer, suivre et contrôler l’exploitation des ressources. Ce renforcement doit garantir une exploitation plus durable et transparente, où chaque projet est aligné sur les priorités nationales.
Mais la véritable rupture se joue dans la création de valeur ajoutée locale. Le Sénégal ne veut plus exporter ses matières premières à l’état brut : il ambitionne de les transformer sur place. Ainsi, plusieurs pôles industriels sont en cours de structuration :
Un pôle Phosphate-Engrais à Matam, pour produire localement des fertilisants et répondre au défi de la souveraineté alimentaire ;
Des pôles d’accélération industrielle à Diass et Diamniadio, dédiés aux matériaux de construction, pour soutenir la croissance urbaine et l’emploi local ;
Un hub minier régional à Kédougou, véritable écosystème autour des métaux précieux et de la logistique minière, qui renforcera la compétitivité et la formalisation du secteur aurifère.
Ces projets structurants s’accompagnent d’une politique ambitieuse de contenu local, encourageant les entreprises nationales à s’intégrer dans les chaînes de valeur minières, tout en favorisant la formation et l’emploi des jeunes dans les régions concernées.
Innovation, formation et durabilité : les mines de demain
Pour accompagner cette transformation, l’État mise sur la formation et l’innovation. À Thiès, un Écosystème du savoir et de la formation aux métiers des mines et de la géologie verra le jour. Il regroupera les institutions existantes autour d’un campus unique modernisé, afin de former une nouvelle génération d’ingénieurs, de techniciens et de géologues sénégalais.
Des partenariats stratégiques avec des universités et centres de recherche internationaux sont prévus pour garantir une formation conforme aux standards mondiaux et encourager la mobilité scientifique. En parallèle, des incubateurs et plateformes d’innovation seront mis en place pour stimuler la recherche appliquée, réduire l’empreinte écologique de l’exploitation et accélérer la mise au marché de solutions technologiques locales.
Au cœur de cette dynamique, le président Diomaye Faye a tenu à rappeler la dimension humaine et éthique de la transformation minière : « Aucune mine ne doit prospérer là où l’humain décline. Et aucun projet ne doit se développer au détriment des générations futures. J’invite également les opérateurs à renforcer leur ancrage territorial, en intégrant de manière proactive les préoccupations des communautés impactées. », a-t-il affirmé. Ces propos traduisent la philosophie d’un État qui veut faire du secteur minier non plus une rente, mais un vecteur de justice sociale, d’équité territoriale et de souveraineté économique.
Un horizon industriel et souverain
Avec des projets phares comme le pôle industriel Phosphate-Engrais de Matam et le renforcement du Service géologique national, le Sénégal se dote des leviers nécessaires pour concrétiser sa Vision 2050. La diversification autour de quatre grandes filières – phosphates-engrais, matériaux de construction, fer/métallurgie et métaux précieux – illustre une stratégie globale : passer d’un modèle extractif à un modèle productif, tourné vers la transformation et la création d’emplois.
En redéfinissant son modèle minier, le Sénégal se positionne comme un acteur régional majeur et trace la voie d’un développement fondé sur la connaissance, la responsabilité et la valorisation de ses richesses naturelles. Le SIM 2025 marque ainsi un tournant : celui d’un pays qui choisit d’extraire moins pour transformer plus et surtout, pour bâtir durablement son avenir.
Par Cheikh Gora DIOP
