(Agence Ecofin) – Les marchés financiers ont salué l’annonce du FMI, qui a inscrit à l’agenda de son conseil d’administration, ce vendredi 3 octobre, l’examen du dossier de mauvaise déclaration budgétaire du Sénégal. Un signal qui éloigne la perspective d’un remboursement anticipé et rouvre la voie à un nouvel accord.
L’eurobond 2028 du Sénégal (coupon 4,75 %) a connu une envolée spectaculaire ce vendredi 3 octobre 2025, à la Bourse de Francfort. Le titre a progressé de +3,24 % en une seule séance, pour s’établir à 90,15, soit une hausse de près de 17 % depuis son point bas du 10 juillet dernier. Cette dynamique montre le regain de confiance des investisseurs après plusieurs mois de doutes nourris par l’affaire dite de « misreporting » (fausse déclaration de la dette publique).
Des correctifs exigés par le FMI
Le FMI a confirmé qu’il travaille étroitement avec les autorités sénégalaises depuis sa mission du 19 au 26 août, menée à la suite du rapport de la Cour des comptes publié en février dernier. Cette mission avait pour objectif d’évaluer les mesures correctives à mettre en œuvre après la constatation de données budgétaires et de dettes inexactes. Parmi les réformes discutées figurent : la centralisation de la gestion de la dette, le renforcement du Comité national de la dette publique, un audit exhaustif des arriérés de paiement, la création d’une base de données centralisée de la dette, et la consolidation des comptes de l’État dans un compte unique du Trésor (TSA). Ces mesures, selon Julie Kozack, porte-parole du FMI, visent à « restaurer la transparence budgétaire, assurer la fiabilité du reporting et prévenir de futurs cas de mauvaise déclaration ».
Vers une dérogation et un nouveau programme
La question centrale pour les investisseurs est de savoir si le Sénégal serait contraint à un remboursement anticipé des fonds déjà engagés dans le cadre du précédent programme. L’hypothèse d’une telle sanction semble désormais écartée. Le conseil d’administration devrait accorder une dérogation, permettant au pays de solder le dossier sans déclenchement de défaut technique.
Le FMI souligne toutefois que certaines discussions restent ouvertes entre ses équipes et les autorités de Dakar. Celles-ci devront être conclues avant la clôture officielle du dossier de « misreporting ». Parallèlement, les contours d’un nouvel accord de financement sont déjà en discussion, avec en toile de fond la soutenabilité de la dette publique, tant en termes de volume que de coût.
Un cas pilote pour la région ?
Au-delà du cas sénégalais, une question émerge : le pays peut-il devenir un cas pilote pour d’autres économies africaines confrontées à des défis similaires de dette et de transparence budgétaire ? Sur ce point, la prudence domine au FMI. « Nous sommes une organisation qui apprend et nous tirons des leçons de chaque expérience, mais à ce stade notre priorité reste de soutenir le Sénégal », a précisé Mme Kozack.
Le plus dur reste à venir
Si la réaction positive du marché offre une bouffée d’oxygène — le Sénégal ayant des eurobonds à rembourser dans les prochains mois — le chemin demeure semé d’embûches. Le pays devra convaincre sur sa capacité à mettre en œuvre ces réformes structurelles et à restaurer durablement la confiance des bailleurs. La prochaine étape se jouera donc au conseil d’administration du FMI, avec en ligne de mire la conclusion d’un nouveau programme censé garantir la soutenabilité du stock et du coût de la dette.
Fiacre E. Kakpo
Edité par M.F. Vahid Codjia