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Mamadou Badio Camara, un rendez-vous avec l’histoire

par pierre Dieme
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Le président de la République remet le Conseil constitutionnel sur le chemin du droit. Par décret numéro 2022- 1573 du 1er septembre, le Président Macky Sall a nommé Mamadou Badio Camara président du Conseil constitutionnel,

Le président de la République a procédé à la nomination du remplaçant de Pape Oumar Sakho admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite depuis le 11 août dernier. Par décret numéro 2022-1573 du 1er septembre, le Chef de l’Etat, Macky Sall a nommé Me Awa Dièye, avocate à la Cour, membre du Conseil constitutionnel et Mamadou Badio Camara (70 ans) président du Conseil constitutionnel. Ce choix porté sur l’ancien Premier président de la Cour suprême remet au goût du jour le débat sur la 3ème candidature du Président Sall, mais aussi fait trembler Khalifa Ababacar Sall et Karim Wade qui gardent en lui, de très mauvais souvenirs.

Le président de la République remet le Conseil constitutionnel sur le chemin du droit. Par décret numéro 2022- 1573 du 1er septembre, le Président Macky Sall a nommé Mamadou Badio Camara président du Conseil constitutionnel, informe un communiqué rendu public hier, vendredi 2 septembre par le ministre, Secrétaire général de la présidence de la République qui précise par ailleurs que, Me Awa Dièye, avocate à la Cour, a été nommée membre du Conseil constitutionnel. Il faut dire qu’à travers cette nomination, le président de la République vient ainsi de mettre fin à la situation de fonctionnement «irrégulier» dans laquelle, se trouvait cette haute juridiction depuis le 11 août dernier, date à laquelle, le président du Conseil constitutionnel sortant, Pape Oumar Sakho a terminé son mandat de six ans non renouvelables en sous-effectif et sans président.

Entre Pape Oumar Sakho et Mamadou Badio Camara, on est aussi tenté de dire que les deux magistrats sont liés par le destin. En effet, il y a quelques années, c’est le même Badio Camara que le chef de l’Etat Macky Sall avait choisi pour remplacer Pape Oumar Sakho à la tête de la Cour suprême comme Premier président en mars 2015. Sept ans aujourd’hui, voilà que l’histoire se répète d’une forte belle manière pour Mamadou Badio Camara dont la nomination n’a rien de surprenante. En effet, de tous les membres actuels de la Haute juridiction, l’ancien Premier président de la Cour suprême est le plus haut gradé. Issue de la promotion de 1977 de l’École nationale d’administration et de magistrature du Sénégal (Enam d’alors), il cumule une expérience de plus 40 ans au sein de l’institution judiciaire sénégalaise.

UNE PRESIDENCE DE 5 ANS A LA TETE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Nommé par décret numéro 2022-1573 du 1er septembre, nouveau président du Conseil constitutionnel en remplacement de Pape Oumar Sakho admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite depuis le 11 août dernier, Mamadou Badio Camara ne fera pas six ans à la tête de cette haute juridiction. Il va exercer un mandat de cinq ans. Et pour cause, nommé par décret n°2021-982 du 26 juillet 2021, membre du Conseil constitutionnel, le nouveau président a déjà consommé un des six ans qu’il a droit au sein de cette Institution. Par conséquence, il lui reste que 5 ans puisqu’il n’a pas hérité du mandat d’un président démissionnaire ou décédé qui n’a pas exercé la moitié de son mandat.

REFUS DE SE SOUMETTRE À LA LOI SUR LA DÉCLARATION DE PATRIMOINE

Nommé hier, président du Conseil constitutionnel par le président de la République, Mamadou Badio Camara au-delà de son long parcours de magistrat va certainement faire l’objet d’une surveillance très particulière de la part notamment des opposants politiques de l’actuel chef de l’Etat mais aussi des responsables d’organisations de la société civile sénégalaise. Et ce, à cause des certains actes qu’il avait posés lors de son passage à la Cour suprême. Désigné Premier président de la Cour suprême en 2015, il avait refusé de se soumettre à la loi sur la déclaration de patrimoine devant l’Office national de Lutte contre la Fraude et la Corruption (OFNAC).

Son attitude avait d’ailleurs poussé, Nafi Ngome Keïta, alors présidente de cet organe dont la mission est la «prévention et la lutte contre la fraude et la corruption, les pratiques assimilées et les infractions connexes» à adresser au président de la République une lettre dont elle rendra publique, une partie du contenu, lors d’une conférence de presse tenue quelques jours après son limogeage à la tête de l’Ofnac. «Je m’abstiendrais de saisir la Cour suprême (pour contester mon limogeage) pour excès de pouvoir, car son Premier président (Mamadou Badio Camara) qui est censé recevoir mon recours, est en désaccord avec l’OFNAC, parce qu’il s’abstient de faire sa déclaration de patrimoine, comme du reste vos ministres conseillers. Quand je vous ai rendu compte, vous m’avez demandé de le laisser tranquille, alors qu’il est assujetti à la déclaration de patrimoine (…)». Pour sa défense, Mamadou Badio Camara soulignant que le budget de la Cour suprême ne fait que 800 millions, avait indiqué qu’il n’est pas assujetti à la déclaration de patrimoine.

LE PROJET DU 3ÈME MANDAT DE MACKY SALL

Présenté comme très proche de l’actuel chef de l’Etat, cette nomination de Mamadou Badio Camara à la tête du Conseil constitutionnel va certainement relancer le débat autour de la troisième candidature de l’actuel chef de l’Etat. En effet, au-delà du refus de se soumettre à la loi sur la déclaration de patrimoine, le passage du nouveau président du Conseil constitutionnel à la tête de la Cour suprême a été également marqué par des décisions controversées rendues cette haute juridiction notamment dans les affaires de la caisse d’avance de la ville de Dakar et de Karim Wade. A l’époque, il était même accusé d’être en mission commandée au profit de Macky Sall. Sa nomination à la tête du Conseil constitutionnel, organe chargé de recevoir et arrêté la liste des candidature lors de la prochaine présidentielle, va certainement maintenir des suspicions sur la volonté de Macky Sall de briguer un mandat de plus en 2024.

LE REJET DU RABAT D’ARRÊT KHALIFA SALL

Déclaré coupable et condamné à cinq ans de prison dans l’affaire de la caisse d’avance de la ville de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, alors candidat déclaré à l’élection présidentielle de février 2019 avait introduit auprès de la Cour suprême un rabat d’arrêt contre l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour suprême qui avait rejeté ses pourvois en cassation. Défini comme «la mise à néant, par la juridiction, de la décision qu’elle a rendu, lorsque celle-ci est entachée d’une erreur manifeste, résultant, dans la procédure, d’une défaillance de service et donc non imputable aux parties et, ayant affecté surtout la décision rendue par le juge de cassation». Ce rabat d’arrêt était censé permettre à Khalifa Sall de participer à l’élection présidentielle de 2019 malgré sa condamnation. Puisque en vertu de l’article 52 de la loi organique sur la Cour suprême de 2017, ce rabat d’arrêt devait suspendre sa condamnation pénale qui l’empêche d’être candidat jusqu’à ce qu’il soit vidé par la Cour suprême. Seulement, les choses ne sont pas déroulées comme voulu par ses avocats et lui-même.

Réunie sous la présidence de son Premier président en l’occurrence, Mamadou Badio Camara, la haute juridiction a rejeté le rabat d’arrêt en mettant de coter son caractère suspensif que l’ancien avocat général et directeur du Service de la documentation et d’études de la Cour suprême, Abdourahmane Diouf avait qualifié de «doctrine» de cette haute juridiction. Se réjouissant de cette décision, les avocats de l’Etat du Sénégal dans cette affaire avaient indiqué, eux aussi, que le rabat d’arrêt n’est pas un autre recours de cassation donc, il n’a pas un caractère suspensif. Paradoxalement, trois ans après, le gouvernement va soumettre à l’Assemblée nationale un projet de loi organique 29/2021 relatif à la réorganisation de la Cour Suprême dans lequel, une nouvelle écriture déclarant «le caractère non-suspensif du rabat d’arrêt » a été adopté.

KARIM WADE : «MAMADOU BADIO CAMARA EST AU CŒUR DU DISPOSITIF MIS EN PLACE PAR MACKY SALL POUR INSTRUMENTALISER LA JUSTICE CONTRE SES OPPOSANTS POLITIQUES»

En plus du cas de Khalifa Sall, il y a également le dossier de Karim Wade dans lequel, l’implication de l’actuel président du Conseil constitutionnel a été décriée par ses partisans. Condamné par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) en 2015 à six ans de prison ferme, Karim Wade avait lui aussi introduit auprès de la haute juridiction un pourvoi concernant sa radiation des listes électorales par la représentation du Sénégal au Qatar où il vit en exil depuis sa grâce présidentielle. Seulement, ce pourvoi va être rejeté sans concession par le président de la Cour suprême le 30 août 2018.

Réagissant à cette décision, Wade-fils avait accusé le désormais Mamadou Badio Camara d’être «au cœur du dispositif mis en place par Macky Sall pour instrumentaliser la justice contre ses opposants politiques». Loin de s’en tenir là, l’ancien ministre d’Etat avait indiqué également que Mamadou Badio Camara «est l’un des principaux exécutants du complot politico-judiciaire dont je suis victime depuis 6 ans». «En sa qualité de Premier président de la Cour suprême, il porte une responsabilité personnelle, directe et écrasante dans les violations de mes droits fondamentaux, constatées par la Cour de justice de la Cedeao, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, ainsi que toutes les juridictions internationales qui se sont prononcées sur ma situation», avait dénoncé Karim Wade.

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