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Malick Sall : Fin de cavale d’un faussaire

par pierre Dieme
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Vent debout, les magistrats du Sénégal, qui sont en conférence de presse, ce jour, exigent le départ de leur ministre de tutelle. Une première dans l’histoire.
Par Adama Gaye*
La fumée dense s’est évanouie, les paillettes n’ont plus d’effets, il ne reste plus que l’image insoutenable d’un SALLtimbanque. Tenant à peine debout, objet des regards curieux qui le fixent pour savoir comment un tel arnaqueur a-t-il pu se retrouver dans le cœur de l’Etat sénégalais, à un poste aussi stratégique de ministre de la Justice. Comment, telle une sauce avariée ayant tournée, il n’est plus que l’expression la plus aboutie d’une carrière, certes courte mais dévastatrice, de faussaire, incarnation de la vulnérabilité d’un Etat dont il s’est joué, par moult artifices, au moyen de mensonges et manigances sans fin, pour en devenir l’une des personnalités clés, depuis un an et demi. Pas étonnant qu’avec lui, s’effondre le mythe du projet d’émergence qui en était l’ambition suprême proclamée ad nauseam urbi et orbi…


Soudain, il apparaît plus authentique, tel qu’en lui-même. Tous se surprennent à s’étonner de son roulement d’yeux suspects. Son déhanchement suspicieux, dans un exercice de mise en train pour un défilé de mannequins féminins, ne laisse de susciter de discrets pincements à son passage. Suspicieuse, sa moue permanente. Son chef qui ne déparerait pas dans un concours de Miss Diongoma, incliné sur une tête brusquement efféminée frappe les imaginations. Ses grands boubous et ses costumes, peu importe leurs coûts, cassent le peu de masculinité qu’on pouvait lui octroyer. Dans certains quartiers douteux de Los Angeles, ou à Covent Garden, on l’aurait aussitôt accueilli en…famille.
Tous ces signes extravagants auraient dû sonner l’alarme sur son cas. Sa rhétorique mielleuse était un indice encore plus parlant. Ce charme physique outrancier au point d’être gênant, comme pour assumer, suivant son mot fétiche, son être qu’il savait sans doute impossible de masquer les aspérités louches qui s’en dégageaient, n’était-il déployé que pour revendiquer un statut ?
Pari réussi. Dès qu’il fit son entrée fracassante sur la scène nationale, l’an dernier, à un poste de souveraineté, les plus fins observateurs s’étaient doutés de quelque chose, en le voyant sautiller, tel un gamin, ou, pire, telle une diva, sur la photo de famille du nouveau gouvernement. Revoyez cette image, où on le voit sur la première rangée, genoux un peu incurvés, mains ballantes, tête en excursion. Il semblait être libéré d’avoir «vendu» au pays son premier gros mensonge, en se présentant à lui, au titre de sa profession, comme un «avocat d’affaires international à Londres». Dans un pays où l’on aime que ce genre de bluff, il avait fait fort. Sans sourciller, lui qui n’a jamais mis les pieds dans une cour de sa Majesté, dont les séjours Outre-Manche se réduisaient à des rencontres bizarres dans des lieux obscurs avec des vendeurs de vent et d’épices, le voici donc à l’entrée du saint des saints. Et, encadré par certains de ses néo-fans, des journalistes d’i-Télé, applaudi par Farba Ngom, l’analphabète mais griot de qui-on-sait, il s’empressa de prendre ses distances avec les communautés ethniques qu’il draguait dans un passé récent, jusqu’à se refuser à s’exprimer en Wolof, il fit encore plus mouche dès sa première intervention, en réponse aux questions, préparées, d’un journaliste-complice : «je vais mettre de l’ordre dans la justice», clama-t-il, à la grande surprise des auditeurs…


C’était en avril 2019. Le Sénégal venait de découvrir qu’il avait été l’un des architectes de la plus grande fraude électorale de son histoire, celle qui remit illégitimement au pouvoir l’actuel usurpateur de la fonction de Président de la République, en la personne de Macky Sall. Beaucoup s’étaient posés des questions sur le déploiement des moyens financiers qu’on ne lui connaissait pas auparavant, que Malick Sall, puisqu’il s’agit de lui, avait mis en œuvre pour mobiliser, sur des airs ethniques, la communauté pulhar du Fouta, afin qu’elle vote pour le fils du pays. Il n’avait pas hésité une seule seconde à détourner ses sentiments, pourtant loyaux envers la nation, pour l’instrumentaliser à des fins politiciennes de bas-étage. Son engagement débordant était cependant d’abord destiné à le positionner pour obtenir un poste dans la distribution post-électorale.


C’est pourquoi il tenait tant à donner des gages indéniables dans l’application de la stratégie de fraude électorale en cours, sous l’œil attentif de son principal concepteur.
Propulsé à un Ministère de souveraineté, le voici donc en ce début Avril, tout guilleret, et promettant de changer la face du monde. La vérité, c’est qu’il n’avait pas tout dit au nouveau maître qu’il s’était trouvé en jouant de la patronymie qu’ils partagent pour lui faire croire qu’il était son cousin. Faussaire, il avait ainsi caché son jeu. Il ne pipa mot sur son fertile et ondoyant vagabondage relationnel. Parfois, il se faisait passer comme le neveu de Karim Fall, défunt porte-parole d’un ancien Khalife des… mourides. Avant de l’être d’une flopée d’autres connaissances plus ou moins éloignées, convoquées juste pour lui servir de marchepied. Il se posa, tour à tour, en neveu d’un MamadouTalla, ex-conseiller de Modibo Keita, d’un Sada Dia, de Rufisque, d’un Diakaria Diaw, quand il fut directeur de cabinet d’Abdoulaye Wade, sans oublier ses cousins intéressés inventés de toutes pièces, rien que pour les arnaquer, notamment avec un Adama Sall, dont il fut le plus actif pilier dans ses magouilles foncières…


Il cacha surtout les liens qu’il eut avec votre serviteur, grâce auxquels il rencontra un premier chef d’Etat et joua d’entourloupes pour s’approcher d’autres, put gagner de l’argent et se faire photographier avec l’un des monstres sacrés de la politique africaine, Omar Bongo, pour en faire un instrument de promotion de sa personne.
Ses cachoteries étaient cependant une facette profonde de son être. Comme s’il avait une autre vie, qu’il n’osait pas dévoiler. Et surtout, en ces heures où il croyait avoir atteint le pinacle en se bombant le torse, s’en allant répéter çà et là qu’il était le «Garde des Sceaux», revendiquant la charge de surveiller rien moins que les institutions, il lui fallait ne pas révéler le compagnonnage, que je croyais sincère, qui nous avait unit. Par peur de ne pas apparaître fiable pour la mission essentielle qui avait davantage justifié son recrutement ministériel : museler l’homme qui tourmente, faits et chiffres, arguments conceptuels à l’appui, Macky Sall.


C’était la proposition de valeur mercatique qui lui avait donc donné ce maroquin dont il n’était pas peu fier. Les néophytes, comme lui, ont ceci qu’ils tranchent par leur excès de zèle. Et il en fit tellement montre qu’il donnait l’air d’avoir perdu toute raison. C’est cela qui le poussa à lancer une enquête judiciaire fantaisiste pour laver de tout soupçon un Aliou Sall, le frère de Macky, du plus gros scandale de l’histoire du pays autour d’un détournement de ses hydrocarbures. Peu avant, les sénégalais avaient été abasourdis de l’entendre, sortant d’une prière, le jour de la Korité, affirmer que, revenant de la Mecque, il ne pouvait pas penser qu’un musulman se livrerait aux actes imputés à celui qui a détourné plus de 6000 milliards de francs cfa.
Plus il l’ouvrait, plus l’avocat d’affaires international, faussaire de l’acabit des «hommes d’y-affaires» dont on se gaussait dans les contrées sénégalaises naguère, se révélait dans sa nature fourbe et faux, minable. Comme en cet après-midi où il fit sa première sortie à l’Assemblée nationale en s’y distinguant par des propos qu’un palefrenier aurait réfutés, dans un salmigondis indéchiffrables qui suffit à ancrer les doutes dans les esprits sur sa capacité à exercer la charge lourde sur ses épaules.
Mon arrestation illégale, qu’il osa…assumer au mépris du droit, devint le point de départ de sa déchéance en fast-track. Depuis ce 29 juillet 2019 où elle intervint, au motif que mes écrits déstabilisaient la République et offensaient son Président (illégitime), notamment à travers des attaques sur ses mœurs (que nul n’osa nier), la face de Malick Sall, sous la torche de Dieu, explose aux yeux du monde entier.


Ne revenons pas sur la justice qu’il a transformée en capharnaüm, lui qui voulait y apporter ordre et discipline. N’insistons pas sur les grèves en série, connues de tous, qui ont fini de la paralyser. Il n’est pas non plus besoin de rappeler ses gravissimes accointances avec la mafia libano-sénégalaise, comme dans l’Affaire non encore élucidée de Batiplus, au point de susciter la curiosité des limiers Américains du FBI. Dire le sentiment général qu’il a fait de la justice sénégalaise, sous son incapable autorité, une parodie où triomphe l’injustice et l’inéquité serait perdre sa salive.
Sous son regard passif, d’une complicité évidente, trafiquants de drogue et falsificateurs de billets de banques sont libérés plus facilement que le garçon qui s’est bagarré pour jouer à un match de football de quartier.
Les parrains de haute criminalité savent qu’avec lui la prison n’est plus cet hôtel zéro étoile mais une retraite luxueuse où ils sont traités en pachas avant d’être rapidement élargis, avec l’aide d’un Etat singulièrement accommodant avec les criminels de leur espèce.
Le clou de la faillite judiciaire du Sénégal, sous Macky Sall, est illustré par le rejet unanime dont le sinistre ministre de la justice qu’il a donné au Sénégal subit de tous les coins des professions de ce secteur.


Point n’est plus besoin de rédiger la notice nécrologique ni de situer la place de Malick Sall dans le palmarès de la justice voire du pays tout court : avec l’unanime, l’universel, dépit qu’il rencontre désormais dans les rangs des magistrats du Sénégal, qui l’ont écrit, et vont le dire ce jour, on peut, sans crainte d’être démenti, affirmer qu’il est la tâche humaine la plus sombre à avoir jamais mis les pieds sur la terre sénégalaise.
En plus de son ethnicisme affiché et de son inclinaison religieuse auprès de la famille Tall et autres dignitaires religieux pulars, décents et pieux, pour se servir d’eux, cet individu a poussé le bouchon plus loin encore en jouant la carte de la xénophobie, la sénégalité, contre un méritant compatriote, qui n’est autre que Souleymane Teliko, Président des magistrats du Sénégal.


A tous points de vue, le doute n’est plus permis : Malick Bédié restera ainsi dans les annales sénégalaises comme le pire salaud, traitre, larbin, incompétent, prêt à toutes les bassesses et illégalités.
Les magistrats ont raison d’exiger son départ. Qui, en réalité, est une demande nationale. Au nom de la salubrité publique.
Adama GAYE, Exilé politique au Caire, 2 Octobre 2020
PS : Ce qui est bon avec la levée de boucliers contre Malick Sall, c’est qu’elle nous éloigne du débat fictif sur les inondations dont on peut suspecter qu’il ne risque que de nous entraîner dans celui malvenu d’un 5-D : Débat, Distraction, Déballage, Diversion, Désordre !
C’est le comble du désordre. Dans un pays sens dessus dessous. En pleine crise. C’était ce à quoi on s’attendait le moins. A la place du 5-G, le nec plus ultra de la nouvelle technologie numérique, le Sénégal se doit de refuser de s’enfoncer dans les ténèbres que porterait celui de la 5-D. Passons aux choses sérieuses.

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