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jeudi, avril 18, 2024
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Les forĂȘts casamançaises en sursis !

par pierre Dieme

Une comparaison analytique de la gĂ©omorphologie des massifs forestiers en Casamance laisse apparaĂźtre une destruction Ă  grande Ă©chelle du couvert vĂ©gĂ©tal. La complicitĂ© multi-acteurs en des lieux insoupçonnĂ©s, l’insĂ©curitĂ© ambiante charriĂ©e par un conflit indĂ©pendantiste, l’insuffisance des moyens et du personnel font le ventre mou d’un trafic qui ouvre le boulevard Ă  l’installation du dĂ©sert. Les arbres aux cimes jointives cĂšdent la place Ă  une clairiĂšre. Le mal est endogĂšne et le pĂ©ril imminent ! A quand les Ă©tats gĂ©nĂ©raux de la forĂȘt pour prĂ©server les derniers massifs encore debout ? Jusqu’au tout dĂ©but des annĂ©es 2000, les forĂȘts casamançaises gardaient leur charme verdoyant, avec des espĂšces vĂ©gĂ©tales aux cimes jointives. La forĂȘt Ă©tait reine, parce que sacrĂ©e. Son exploitation Ă©tait soumise Ă  des rĂšgles de protection environnementale, avec des conditions de contribution Ă  la rĂ©gĂ©nĂ©ration des espĂšces abattues. Les agents des Eaux, ForĂȘts et Chasses jouaient pleinement leur fonction d’encadreur et moins rĂ©pressive que les conditions actuelles les y ont reconvertis. En son temps donc, ces bĂ©rets verts Ă©laboraient des plans de production de pĂ©piniĂšres et d’entretien du tapis vert.

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LES MASSIFS FORESTIERS VENDUS, LE BOULEVARD DU DESERT OUVERT !

L’exploitation du bois en Casamance Ă©tait soumise Ă  une boulimie mercantiliste. Entre 2000 et 2007, un «commerce triangulaire» a vu le jour et dont le tracĂ© indique clairement le point de coupe en Casamance, le transit via le port international de Banjul, en Gambie, puis la destination Chine du produit trĂšs prisĂ© au pays l’Empire du milieu (Thiounkwo). Au cƓur de ce trafic illicite de bois se blottissent de gros bonnets Ă  savoir des maires de communes rurale, des ingĂ©nieurs des Eaux et ForĂȘts, des chefs de village, des hommes de l’ArmĂ©e et des indĂ©pendantistes du Mouvement des Forces DĂ©mocratiques de Casamance (MFDC). L’enjeu Ă©tait multiple et variĂ©. Qui pour en faire des meubles, qui pour bĂątir son habitat et beaucoup pour vendre le bois notamment l’espĂšce «vĂšne» trĂšs prisĂ©es. A partir de la Gambie donc, des Chinois et mĂȘme des Indiens actionnent des leviers, avec comme force de frappe, des devises Ă©trangĂšres, des motos cylindrĂ©es et des denrĂ©es alimentaires contre la cession des billons de bois abattu. 2007 a constituĂ© un point culminant de ce trafic, avec l’arrestation de 11 camions et remorques Ă  plateau en partance pour le pays d’alors de Dr Alaji Yahya Jammeh. Les foyers nĂ©vralgiques des coupes de bois Ă©taient la bande frontaliĂšre avec ce pays enclavĂ© Ă  l’intĂ©rieur du SĂ©nĂ©gal, sur ses limites avec les rĂ©gions mĂ©ridionales (SĂ©dhiou, Kolda et Ziguinchor). Ainsi, du Nord Sindian, dans le dĂ©partement de Bignona (Ziguinchor), Ă  MĂ©dina Yoro Foula (Kolda), en passant par le Fogny, le Kabada/Dator (SĂ©dhiou) et le Fouladou (Kolda), l’ébullition des transactions Ă©tait sans rĂ©pit.

FORESTIERS DETERMINES, MAIS INHIBES PAR L’INSUFFISANCE DES MOYENS ET DES EFFECTIFS

L’abnĂ©gation des agents des Eaux et ForĂȘts sur le terrain ne souffre d’aucun doute. TrĂšs souvent et Ă  l’appel d’anonyme qui dĂ©noncent des prĂ©sences destructrices de forĂȘts, ces agents dĂ©barquent avec promptitude sur le terrain et rĂ©alisent trĂšs souvent des opĂ©rations de saisies de billons de bois, de charrettes Ă  traction animale ainsi que l’arrestation de dĂ©linquants auteurs des coupes illicites de bois. Toutefois, l’insuffisance du personnel ne milite point Ă  un dĂ©ploiement grandeur nature sur le terrain. Il s’y ajoute Ă©galement une carence en logistiques roulantes, surtout durant les annĂ©es 2007 jusqu’en 2014. N’est-ce pas ce qui a, du reste, lĂ©gitimĂ© l’option des interventions conjointes des Forces de dĂ©fense et de sĂ©curitĂ© Ă  savoir Forestiers, ArmĂ©e et Gendarmerie. Ces six derniers mois, les agents des Eaux et ForĂȘts de Bounkiling et de SĂ©dhiou ont rĂ©alisĂ© d’énormes saisies de bois et d’animaux avec leurs charrettes qui servent Ă  transporter les produits. Et malgrĂ© cette dĂ©termination des corps habillĂ©s et certaines factions des sĂ©paratistes opposĂ©es Ă  la coupe de bois, des Ă©lus contournent les lois par la production de documents de dĂ©frichement qui, en rĂ©alitĂ©, n’est qu’un manteau rocambolesque de coupes de bois verts Ă  grande Ă©chelle. Comme pour attester que les lames tranchantes de la corruption ne laissent aucune chance de survie au couvert vĂ©gĂ©tal.

LA CLAIRIERE ANNONCE LE DESERT, LA MORT PROGRAMMEE DE LA FORET !

A ce rythme effrĂ©nĂ© des coupes de bois en Casamance, qui doit encore douter l’installation progressive du dĂ©sert dans cette partie mĂ©ridionale du SĂ©nĂ©gal. Un tour dans les zones du Kabada, du Dator et du Sonkodou (dans la rĂ©gion de SĂ©dhiou) met Ă  nu un constat de dĂ©solation face au vent de sable. Et d’ailleurs, les vents annonciateurs de l’hivernage ayant soufflĂ© sur la rĂ©gion de SĂ©dhiou ont entrainĂ© d’importants dĂ©gĂąts matĂ©riels sur les habitations, en l’absence de rideau dĂ©fensif de bois. L’abattage des forĂȘts supprime non seulement des habitats naturels et menace gravement la flore et la faune prĂ©sente, mais il peut Ă©galement conduire Ă  la rĂ©duction de la biodiversitĂ© et de graves changements sur les climats, Ă  mĂȘme de compromettre la vie des hommes et de tout l’écosystĂšme. N’y a-t-il pas urgence de convoquer les Ă©tats gĂ©nĂ©raux de la forĂȘt pour vraiment prĂ©server les restes de massifs forestiers encore debout ? Les cultures et la survie des espĂšces vivantes sont mises en pĂ©ril. Le dĂ©sert est lĂ  !

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