Une comparaison analytique de la gĂ©omorphologie des massifs forestiers en Casamance laisse apparaĂźtre une destruction Ă grande Ă©chelle du couvert vĂ©gĂ©tal. La complicitĂ© multi-acteurs en des lieux insoupçonnĂ©s, lâinsĂ©curitĂ© ambiante charriĂ©e par un conflit indĂ©pendantiste, lâinsuffisance des moyens et du personnel font le ventre mou dâun trafic qui ouvre le boulevard Ă lâinstallation du dĂ©sert. Les arbres aux cimes jointives cĂšdent la place Ă une clairiĂšre. Le mal est endogĂšne et le pĂ©ril imminent ! A quand les Ă©tats gĂ©nĂ©raux de la forĂȘt pour prĂ©server les derniers massifs encore debout ? Jusquâau tout dĂ©but des annĂ©es 2000, les forĂȘts casamançaises gardaient leur charme verdoyant, avec des espĂšces vĂ©gĂ©tales aux cimes jointives. La forĂȘt Ă©tait reine, parce que sacrĂ©e. Son exploitation Ă©tait soumise Ă des rĂšgles de protection environnementale, avec des conditions de contribution Ă la rĂ©gĂ©nĂ©ration des espĂšces abattues. Les agents des Eaux, ForĂȘts et Chasses jouaient pleinement leur fonction dâencadreur et moins rĂ©pressive que les conditions actuelles les y ont reconvertis. En son temps donc, ces bĂ©rets verts Ă©laboraient des plans de production de pĂ©piniĂšres et dâentretien du tapis vert.
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!LES MASSIFS FORESTIERS VENDUS, LE BOULEVARD DU DESERT OUVERT !
Lâexploitation du bois en Casamance Ă©tait soumise Ă une boulimie mercantiliste. Entre 2000 et 2007, un «commerce triangulaire» a vu le jour et dont le tracĂ© indique clairement le point de coupe en Casamance, le transit via le port international de Banjul, en Gambie, puis la destination Chine du produit trĂšs prisĂ© au pays lâEmpire du milieu (Thiounkwo). Au cĆur de ce trafic illicite de bois se blottissent de gros bonnets Ă savoir des maires de communes rurale, des ingĂ©nieurs des Eaux et ForĂȘts, des chefs de village, des hommes de lâArmĂ©e et des indĂ©pendantistes du Mouvement des Forces DĂ©mocratiques de Casamance (MFDC). Lâenjeu Ă©tait multiple et variĂ©. Qui pour en faire des meubles, qui pour bĂątir son habitat et beaucoup pour vendre le bois notamment lâespĂšce «vĂšne» trĂšs prisĂ©es. A partir de la Gambie donc, des Chinois et mĂȘme des Indiens actionnent des leviers, avec comme force de frappe, des devises Ă©trangĂšres, des motos cylindrĂ©es et des denrĂ©es alimentaires contre la cession des billons de bois abattu. 2007 a constituĂ© un point culminant de ce trafic, avec lâarrestation de 11 camions et remorques Ă plateau en partance pour le pays dâalors de Dr Alaji Yahya Jammeh. Les foyers nĂ©vralgiques des coupes de bois Ă©taient la bande frontaliĂšre avec ce pays enclavĂ© Ă lâintĂ©rieur du SĂ©nĂ©gal, sur ses limites avec les rĂ©gions mĂ©ridionales (SĂ©dhiou, Kolda et Ziguinchor). Ainsi, du Nord Sindian, dans le dĂ©partement de Bignona (Ziguinchor), Ă MĂ©dina Yoro Foula (Kolda), en passant par le Fogny, le Kabada/Dator (SĂ©dhiou) et le Fouladou (Kolda), lâĂ©bullition des transactions Ă©tait sans rĂ©pit.
FORESTIERS DETERMINES, MAIS INHIBES PAR LâINSUFFISANCE DES MOYENS ET DES EFFECTIFS
LâabnĂ©gation des agents des Eaux et ForĂȘts sur le terrain ne souffre dâaucun doute. TrĂšs souvent et Ă lâappel dâanonyme qui dĂ©noncent des prĂ©sences destructrices de forĂȘts, ces agents dĂ©barquent avec promptitude sur le terrain et rĂ©alisent trĂšs souvent des opĂ©rations de saisies de billons de bois, de charrettes Ă traction animale ainsi que lâarrestation de dĂ©linquants auteurs des coupes illicites de bois. Toutefois, lâinsuffisance du personnel ne milite point Ă un dĂ©ploiement grandeur nature sur le terrain. Il sây ajoute Ă©galement une carence en logistiques roulantes, surtout durant les annĂ©es 2007 jusquâen 2014. Nâest-ce pas ce qui a, du reste, lĂ©gitimĂ© lâoption des interventions conjointes des Forces de dĂ©fense et de sĂ©curitĂ© Ă savoir Forestiers, ArmĂ©e et Gendarmerie. Ces six derniers mois, les agents des Eaux et ForĂȘts de Bounkiling et de SĂ©dhiou ont rĂ©alisĂ© dâĂ©normes saisies de bois et dâanimaux avec leurs charrettes qui servent Ă transporter les produits. Et malgrĂ© cette dĂ©termination des corps habillĂ©s et certaines factions des sĂ©paratistes opposĂ©es Ă la coupe de bois, des Ă©lus contournent les lois par la production de documents de dĂ©frichement qui, en rĂ©alitĂ©, nâest quâun manteau rocambolesque de coupes de bois verts Ă grande Ă©chelle. Comme pour attester que les lames tranchantes de la corruption ne laissent aucune chance de survie au couvert vĂ©gĂ©tal.
LA CLAIRIERE ANNONCE LE DESERT, LA MORT PROGRAMMEE DE LA FORET !
A ce rythme effrĂ©nĂ© des coupes de bois en Casamance, qui doit encore douter lâinstallation progressive du dĂ©sert dans cette partie mĂ©ridionale du SĂ©nĂ©gal. Un tour dans les zones du Kabada, du Dator et du Sonkodou (dans la rĂ©gion de SĂ©dhiou) met Ă nu un constat de dĂ©solation face au vent de sable. Et dâailleurs, les vents annonciateurs de lâhivernage ayant soufflĂ© sur la rĂ©gion de SĂ©dhiou ont entrainĂ© dâimportants dĂ©gĂąts matĂ©riels sur les habitations, en lâabsence de rideau dĂ©fensif de bois. Lâabattage des forĂȘts supprime non seulement des habitats naturels et menace gravement la flore et la faune prĂ©sente, mais il peut Ă©galement conduire Ă la rĂ©duction de la biodiversitĂ© et de graves changements sur les climats, Ă mĂȘme de compromettre la vie des hommes et de tout lâĂ©cosystĂšme. Nây a-t-il pas urgence de convoquer les Ă©tats gĂ©nĂ©raux de la forĂȘt pour vraiment prĂ©server les restes de massifs forestiers encore debout ? Les cultures et la survie des espĂšces vivantes sont mises en pĂ©ril. Le dĂ©sert est lĂ !