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jeudi, avril 25, 2024
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G5: Les micmacs de Macron Par Adama Gaye*

par pierre Dieme

C’est un général en déroute qui joue aux fiers-à-bras.

Le Président français Emmanuel Macron s’est livré hier à son sport favori: humilier un groupe de ses pairs africains!

Réunis dans la capitale Tchadienne alors qu’il a choisi de rester, lui, en virtuel depuis Paris, il ne s’est pas privé de les sommer de boire ses consignes quant à l’avenir du G5, cette plateforme sécuritaire que son pays partage avec eux mais qu’il a privatisée en force de frappe néocolonialiste avec l’assentiment de ses dociles interlocuteurs.

Macron a prouvé son mépris envers les dirigeants africains qui l’écoutaient hier comme ses sujets. Il a joué à leur chef, maître suprême, leur ordonnant la feuille de route à suivre pour assurer leur propre sécurité.

Le voir ensuite plastronner, seul, à son pupitre face à la presse africaine et française, en conférence de presse, à l’issue du dernier sommet des pays membres du G5, élargi à d’autres, qu’il a quasiment convoqué, était pire qu’une insulte à ses…collègues, ou plutôt obligés, africains, ayant eux fait le déplacement à N’Djamena (Tchad) où se tenait la rencontre.

Arrogance et condescendance étaient à leur pic dans sa voix professorale. Il parlait un langage humiliant d’un maître qui semblait vouloir prouver sa maîtrise, sur le bout des doigts, comme son territoire conquis, des aires faisant l’objet du Sommet.

On se serait cru à l’ère des conquêtes coloniales, et il ne manquait que les casques des colons pour qu’il reproduise le calque d’un Lemarchand négociant en 1898 à Fachoda, au Soudan, avec le Britannique, Lord Kirchner, les termes du partage final de l’Afrique.

À l’écouter parler du quadrilatérale et de la zone des trois frontières, slalomant dans les diverses sphères soudano-sahéliennes, à mains nues, sans même tenir une baguette pour guider son assistance, on eut dit un maître face à ses esclaves.

Il fallait le suivre rappelant, en coq gaullois, fier, comment il avait consenti à ajouter 500 soldats à la force Barkhane pour voler au secours de ses interlocuteurs désemparés dans un G5 volant en éclats sous la pression des djihadistes.

C’était lors de leur sommet de Pau qu’il avait convié, que dis-je convoqué, pour remonter les bretelles des chefs d’états africains du G5, coupables de ne pas peser sur leurs rétives opinions publiques hostiles à la présence française.

En définissant 4 piliers pour l’action de la plateforme autour de deux clusters, militaire et sécuritaire d’une part, projection des États dans l’administration territoriale et développement des communautés d’autre part, Macron se pose autant en impérialiste qu’en chef de guerre sans craindre d’oublier que son pays traîne le souvenir de capitulations à répétition.

En vérité, en feignant hier de maintenir à son nombre actuel la taille de la présence militaire française dans cette partie agitée, violente, du continent, le président français joue un grand jeu de la diplomatie pour des objectifs inavoués, se posant en plus futé que ses interlocuteurs.

Démontons donc son manège. Il cherche à faire financer l’ambition hégémonique de son déclinant pays en enrôlant à tour de bras des partenaires qui n’y voient que du feu.

C’est ainsi qu’étrangement il a pu recruter autour des problématiques africaines des pays tels la Hongrie, la Tchéquie et j’en passe qui n’y voient que du feu. Au Sommet de N’Djamena, il a fait venir Faki Mahamat et Kassi Brou, respectivement présidents des commissions de l’union africaine (UA) et de la CEDEAO sans oublier le Ghanéen Nana-Akuffu Addo, le président en exercice de la CEDEAO.

Naturellement, Louise Mushikiwabo, la Secrétaire Générale de la francophonie, en bouteille habillée, y était. Comme tant d’autres hâbleurs, dealers de la sécurité, dont les discours pompeux et larmoyants ont rappelé combien ce genre de réunions sert de remontant aux acteurs qu’affrontent le G5 et ses alliés.

L’hôte du sommet, le Président Tchadien, buvait cependant son petit lait.

Vicieux, lui garantissant un mandat de plus, excessif, en lui donnant du Maréchal en échange de l’envoi de 1200 autres soldats Tchadiens au front, dans la région meurtrière des trois frontières unissant Niger, Mali et Burkina, Macron a mis le pied sur une démocratie africaine moribonde pour servir la pommade à son nouvel ami et allié, l’éternel chef de guerre Tchadien, Idriss Deby.

Il a fait plus fort en décrochant un titre d’invité d’honneur au Sommet pour le fat Macky SALL qui n’aime que ça : les honneurs en pacotille, et il est venu tête baissée se joindre à la mêlée, au cœur du guêpier !

Macron sait que les français en ont marre de ses coups de menton sans résultats dans des guerres coûteuses financièrement et en vies humaines qu’il mène sur ces confettis d’empire rien que pour faire accroire à une grandeur, hélas surannée, de leur pays.

Ils veulent voir les bérets bleu-blanc-rouge rentrer à la maison à l’heure du nationalisme cocardier et internalisé.

Sa marge de manœuvre n’en est dès lors que plus étroite surtout qu’il lui faut produire un bilan face à l’électorat de plus en plus tenté par l’extrême droite qu’il doit affronter dans un an avec une Marine Le Pen, cheffe du Front National, requinquée par les sondages et mieux préparée donc à déjouer ses bavardages…

Dans ses micmacs sans fin, Macron sait qu’il n’est pas crédible: il ne perd pas de vue que ses opérations militaires tournent à la panade.

Comment peut-il oublier que 50 soldats français y ont déjà trouvé la mort et que les caisses de l’état français étant vides, COVID et autres contre-performances obligent, il se doit de convaincre des bailleurs multilatéraux pour qu’ils continuent d’assumer les coûts de ses aventures ou viennent prendre part aux risques militaires en plus de contribuer à supporter la note fort salée de cette expédition coloniale des temps modernes.

D’où son rêve de voir la Mission des nations unies au Sahel et au Mali (Minusma) rester en place avec un financement onusien et de faire en sorte que la coalition des volontaires (à la George Bush-Junior) qu’il tente vaille que vaille de mettre en place attire enfin un soutien bienveillant de la nouvelle Administration américaine.

Donald Trump, l’ancien président américain, l’avait lourdement snobé.

En faisant parler, à son jamboree d’hier, le nouveau Secrétaire d’Etat, Anthony Blinken, il pense pouvoir convaincre l’actuel chef de la Maison Blanche, Joe Biden, successeur de Trump, à voler au secours d’une France embourbée dans ses plans faillis face aux forces asymétriques, djihadistes ou terroristes, c’est selon, qui lui donnent tant de fil à retordre sur ce qui fut naguère son pré-carré mais n’est plus qu’un cimetière pour ses prétentions, son incapacité.

À écouter les blablas et la vantardise des intervenants aux agapes de N’Djamena, on peut parier que la mission sauvetage qu’il a enrobée d’une dimension internationaliste n’augure rien de bon ni pour son pays ni pour ceux, africains, devenus des États en faillite, sous l’effet corrosif d’une mal-gouvernance au grand bonheur des djihadistes, terroristes et populations civiles excédés par ce cirque.

L’Amerique et l’Afrique, les autres nations et organisations ciblées par l’offensive de charme d’un Macron en débandade, devraient toutes se hater lentement pour ne pas le suivre dans son rôle de nouveau Faidherbe, Archinard ou autres colons français qu’il porte sans en avoir l’épaisseur.

Le G5 reste une farce et Macron l’incarne jusqu’à la tragédie par sa posture risible de chef de guerre et colon édenté !

Son discours guerrier masque mal son angoisse existentielle. C’est la posture d’un être perdu qui cherche une porte de sortie en fourguant à d’autres ce qui est devenu le symbole de l’impotence d’une France affaiblie.

Sous ses airs de frimeur, stratège de salon, il ne réalise même pas que le chant de son pays ne ressemble plus désormais qu’à celui d’un coq déplumé, sans crete ni ergots, qui n’est plus en capacité d’en imposer.

*Adama Gaye est ancien auditeur du Centre des hautes études sur l’Afrique et l’Asie Modernes (Cheam) (Fondation nationale de Sciences politiques et Primature France) et du Centre des hautes études de défense et sécurité (Cheds) des forces armées sénégalaises et de l’université de Dakar.

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