vendredi, mars 29, 2024
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Covid 19 et Passation de Marchés

par admin
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L’union sacrée, nécessaire dans la guerre contre le Covid 19 ne doit pas être la porte ouverte à une gestion calamiteuse et scabreuse de nos deniers. Il est dès lors, normal et à la limite légitime de s’interroger sur la procédure de passation des marchés qui y sont relatifs. La vie continuera après cette crise sanitaire.

Viendra par la suite des lendemains moins cléments avec sans doute cette morosité économique annoncée. Il est alors nécessaire qu’une gestion saine et efficiente de nos ressources soit opérée et cela malgré la nature de l’urgence et surtout malgré la dimension inédite de la pandémie.

D’emblée, il faut signaler que lesdits marchés, objets de la polémique qui couve, ont été soustraits du code des marchés publics (CMP) par le décret 2020-781 portant dérogation au CMP pour les dépenses relatives à la lutte contre le Covid 19. Par conséquent, ni l’ARMP ni la DCMP ne sont habilitées à se prononcer sur les procédures de passation de ces marchés.
La pertinence de ce choix peut laisser à désirer, si l’on sait que la situation imposée par cette pandémie est bel et bien prévue par le CMP qui offre la possibilité à travers l’article 76.2 b, de passer par entente directe des marchés pour lesquels, l’urgence impérieuse, résultant de circonstances imprévisibles, irrésistibles, et extérieurs à l’autorité, n’est pas compatible avec les délais et règles de formes exigés par la procédure d’appel d’offres ouvert ou restreint. Nous sommes là en plein dans la définition de la force majeure. On aurait pu également par des procédures d’urgence, accélérer la cadence ou procéder par des appels d’offres restreints.
Toutefois la légalité d’une telle mesure ne saurait faire débat vu que l’autorité a la latitude de juger de la pertinence des choix à effectuer.

Maintenant, bien qu’étant hors du champs du code des marchés publics, il n’en demeure pas moins pour la plupart, que ce sont des contrats administratifs avec des clauses exorbitantes de droit commun. L’article 24 nouveau Code des Obligations de l’Administration (COA) édicte les principes fondamentaux applicables aux achats et dispose qu’en vue d’assurer l’efficacité de la commande publique et la bonne gestion des deniers publics, la conclusion des contrats d’achats passés à titre onéreux par les acheteurs publics doit entres autres, respecter les principes qui sous-tendent la passation de marchés à savoir l’équité, la transparence, l’égalité des candidats, l’efficience et l’économie qui devront quoiqu’il en soit être de mise.

Le principe d’égalité oblige l’autorité contractante (AC) à définir au préalable les critères de conformité (offre) et de qualification (entreprise) qui aideront à départager les principaux soumissionnaires.
Ainsi donc, pour permettre une plus grande transparence dans l’attribution des marchés, il serait nécessaire de ne pas juste publier les offres proposées par les soumissionnaires mais les critères d’évaluation des offres. Il nous faut éviter de nous baser juste sur le seul fait que les attributaires soient moins disant. Savoir que ces critères préalablement établis dans les spécifications techniques ont été respectés et permettront de déterminer les offres conformes et si ces soumissionnaires aux offres conformes sont qualifiés. Dans un marché, il ne suffit pas d’être juste moins disant.

Sur les questions soulevées quant’ à l’octroi de marché de riz à savoir, s’il est possible que deux sociétés ayant un même propriétaire puissent soumissionner pour un même marché, dans certaines procédures, rien ne s’y oppose si les personnes morales sont différentes. Même si le risque d’une entente illicite est bien présent. Par contre d’autres procédures le rejettent.

Le principe d’équité oblige l’AC à s’assurer que les candidats devront être départagés sans parti pris. Ainsi donc, si pour l’achat de riz, les soumissionnaires ont fait des offres sur la même variété de riz, il serait aisé de faire l’arbitrage. Par contre si les offres obéissent à des spécifications techniques différentes, cela fausserait l’attribution des marchés puisqu’il n’est pas évident de comparer du riz parfumé et non parfumé, du riz brisé ou entier. Les qualités pouvant différer, on peut dès lors, comprendre qu’il en soit de même du prix.
Les marchés de transport obéissent à la même règle. Toutefois, les problèmes qui font débat sur ce marché ci, méritent davantage d’éclaircissements. Si le député en question est le gestionnaire de l’entreprise, le règlement intérieur de l’assemblée nationale aura été violé.
Il aurait été plus judicieux de coupler le marché de fournitures de riz et celui du transport ; le fournisseur devant livrer les commandes aux lieux que l’AC aura déterminés dans le cahier des charges. Il aurait suffi de déterminer le lieu de destination pour que le fournisseur délivre la marchandise partout à travers le Sénégal.

Du point de vue de la commande publique, s’il est avéré que la société est en liquidation judiciaire, cet état de fait ne lui permettrait pas de signer le marché. Le candidat doit en effet s’engager sur l’honneur qu’il ne fait pas l’objet d’une liquidation de biens ou de faillite personnelle et devra à la signature du contrat justifier d’une attestation de non-faillite délivrée par le greffier du tribunal.
Il appartiendra, si la transparence, autre principe de base de la commande publique, doit être respecté que des réponses soient apportées à ces questions par les AC en charge des marchés objet de toute cette polémique.

Il serait tout aussi salutaire qu’à la suite du décret 2020-78, qu’un arrêté d’application soit pris afin de déterminer le ou les modes de passation à défaut d’un manuel de procédures pour tous les marchés relatifs au Covid 19. Cela, afin que nul n’en ignore, serait une autre manière d’éviter les éventuels abus. La traçabilité, la transparence et la rigueur doivent guidées ces choix afin que demain, les corps de contrôle qui ne manqueront pas de s’assurer de la légalité à postériori des actes qui sont en train d’être posés, puissent avoir une base de travail qui, ne souffrira d’aucune contestation.

Alioune Badara Bèye
beyebadou@hotmail.com
Spécialiste en Passation de Marchés

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