Accueil Politique Macky Sall annonce la mise d’une commission : les « droits-de-l’hommistes » sont-ils à couteaux tirés !

Macky Sall annonce la mise d’une commission : les « droits-de-l’hommistes » sont-ils à couteaux tirés !

par admin
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Deux jours après avoir reçu les rapports 2015, 2016 et 2017 de la Cour des comptes qui a épinglé la gestion de certains directeurs généraux et personnalités de l’Alliance pour la République, le Président de la République, Macky Sall, a annoncé la mise en place d’une commission pour l’exploitation de ces rapports. Il s’exprimait hier, lundi 3 février, en marge de la cérémonie de levée des couleurs au Palais de la République.

« Le suivi sera fait. Beaucoup de managers sont attraits devant la chambre de discipline financière. Peut-être, elle ne fait pas l’objet d’une publicité, et c’est tant mieux ainsi », a déclaré Macky Sall. Et d’ajouter : « mais des sanctions pécuniaires y sont faites. D’autres sanctions nécessitent que la justice se prononce, les dossiers seront transmis au niveau des juridictions».

Toutefois, le Président de la République qui s’est félicité des résultats de la Cour des comptes a appelé à plus de retenue. Pour cause, a-t-il dit, « le contrôle démontre juste s’il y a une conformité avec les textes ou non. Les textes mêmes parfois doivent évoluer, ensuite il y a de nouveaux textes comme ceux de l’Uemoa, par exemple la procédure du budget-programme. Ça demande de la pédagogie sur l’application. On ne peut pas s’appuyer sur ce qui s’est dit et incriminer les gens comme ça». Allant plus loin, Macky dira : «Il est très important qu’on remette dans leur contexte le sens des rapports de la Cour des comptes, de l’Inspection générale d’Etat et des rapports produits par le contrôle financier, qui veillent et accompagnent la gestion des entreprises publiques ». Le président Macky Sall a précisé par ailleurs qu’en ce qui concerne les rapports, « il est à noter des manquements au respect des procédures, des entorses au Code des marchés, et surtout des recommandations pour corriger souvent des erreurs de procédures ou des actes non conformes ».

Le Président de la République d’ajouter : « et, surtout, il a été noté aussi des recommandations pour corriger souvent des erreurs de procédures ou des actes non conformes ». Ce qui lui fait dire que « voilà la bonne lecture qu’il faut avoir, c’est moins ceux qui s’épanchent dans la presse que les mesures qui ont été préconisées par nous-mêmes pour que justement les deniers publics soient gérés de la meilleure des façons qu’il soit ».  A l’en croire, la Cour des comptes aura son siège car les travaux sont presque à terme.

SUITE A DONNER AUX TROIS RAPPORTS DE LA COUR DES COMPTES : Me Assane Dioma Ndiaye et Seydi Gassama exigent des sanctions, Me Pape Sène tempère

Après la publication le 31 janvier dernier par la Cour des comptes de ses rapports qui ont incriminé la gestion de certains responsables proches du pouvoir en place, des leaders d’organisations de défense des droits de l’homme montent au créneau pour exiger du président de la République des actions concrètes concernant les décisions et recommandations formulées. Interpellés par la rédaction de Sud quotidien hier, lundi 03 février, Me Assane Dioma Ndiaye, président de la Ligue sénégalaise des droits de l’homme mettant en garde le pouvoir en place a indiqué que «s’il n’y a pas de redevabilité, il est illusoire de parler de transparence ou de bonne gouvernance». Abondant dans le même sens, Seydi Gassama, directeur exécutif de la Section sénégalaise d’Amnesty international renvoie toutefois la balle aux citoyens sénégalais à qui, selon lui, il appartient d’exiger du pouvoir en place que les recommandations des magistrats de la Cour des comptes soient appliquées». Pour sa part, Me Pape Séne, président du Comité sénégalais des droits de l’homme (csdl) saluant l’initiative du président de la République de créer une commission pour examiner ces rapports souligne qu’«il est prématuré de parler d’absence de sanction».

ME ASSANE DIOMA NDIAYE, PRESIDENT DE LA LIGUE SENEGALAISE DES DROITS DE L’HOMME : «S’il n’y a pas de redevabilité, il est illusoire de  parler de transparence ou de bonne gouvernance»

Il faut que le Président comprenne l’enjeu de ces questionnements du citoyen. Autant on pouvait tolérer des critiques ou en tout cas des rejets par rapport de l’Ofnac, au rapport de l’Armp, mais là ce sont des magistrats. La Cour des comptes, il ne faut pas oublier que ce sont des magistrats financiers. Ce sont des magistrats comme les magistrats qui sont dans les autres tribunaux. Si aujourd’hui, on considère que le travail qu’ils ont produit n’a aucune valeur, c’est simplement décrédibiliser un pan entier de notre architecture institutionnelle.

Ça se rejaillit sur une justice qui est déjà très affaiblie. Je pense que le pouvoir doit étudier avec minutie ces rapports et y donner les suites qui conviennent. Au-delà de cette menace de discrédit, il y a également le discrédit général que les Sénégalais risquent de vouer à ces organes de contrôle de façon globale et les Sénégalais se posent la question : quelle est l’utilité finalement de ces organes de contrôle et de l’argent des citoyens qui leur est affecté ? Et dans un pays, s’il n’y a pas de contrôle, s’il n’y a pas de redevabilité, il est illusoire de parler de transparence ou de bonne gouvernance. Si l’impunité est la règle, évidemment, c’est un Etat qui est voué à la déperdition.

On ne peut pas inscrire sur la Constitution de façon claire que le Sénégal réaffirme son ancrage aux règles de bonne gouvernance et en même temps, que tous les rapports des organes de contrôle soient voués aux gémonies. Il est important que le Président de la République et la justice marquent le coup par rapport à ces rapports, surtout les derniers rapports de la Cour des comptes et que toute personne qui serait appelée à gérer sache qu’il y a une épée de Damoclès qui est suspendue sur sa tête et en cas de manquements, il n’y aurait pas d’impunité. Il faut que ce signal fort soit donné. Sinon depuis l’indépendance, on est dans ce même cycle infernal où les deniers publics sont dilapidés et il n’y a aucune sanction corrélative et là les Sénégalais sont de plus en plus ancrés dans l’idée selon laquelle pouvoir rime avec cette appropriation des deniers publics. Il faut que cette mentalité soit déconstruite et ça ne peut l’être que s’il y a des gouvernants qui, par une volonté publique inébranlable, sanctionnent ceux qui sont épinglés ou ayant mal géré.

On ne parle pas forcément de sanction pénale mais au moins la Cour recommande dans certaines hypothèses le remboursement des sommes pour les comptables ou les ordonnateurs qui n’ont pas pu gérer en bon père de famille. Il est important que le peu de deniers que nous avons dans un pays sous-développé soient utilisés de façon minutieuse et surtout dans l’intérêt général et non pas pour des intérêts purement privés, claniques, ethniques ou sous une forme de copinage de continue. Aujourd’hui, le débat est posé.

SEYDI GASSAMA, AMNESTY INTERNATIONAL : «Il appartient aux citoyens d’exiger que les recommandations de la Cour soient appliquées»

Je pense que ces rapports sont d’un très grand intérêt pour les populations sénégalaises. Ils permettent de savoir jusqu’où la prédation des ressources publiques se situe. On peut tout reprocher à ces magistrats de la Cour des comptes sauf d’être des gens compétents, sauf de faire le travail avec professionnalisme ou rigueur. Maintenant, ce que les politiciens font de ces rapports, c’est autre chose. Il appartient aux citoyens d’exiger que les recommandations des magistrats de la Cour des comptes soient appliquées. C’est aux citoyens de faire la pression pour que les recommandations soient mises en œuvre, que les poursuites judiciaires soient initiées lorsqu’elles sont recommandées. Il faut savoir que la difficulté que nous avons dans ce pays, c’est depuis l’ère d’Abdou Diouf, ça s’est empiré sous Abdoulaye Wade et Macky Sall. Systématiquement à la tête de toutes les sociétés nationales, toutes les agences et les directions les plus juteuses du pays, on a mis à la tête des politiciens, des militants du parti au pouvoir ou des militants de la coalition au pouvoir. On nomme des gens pour les récompenser parce qu’ils ont gagné chez eux. On nomme des gens parce qu’on veut leur donner les moyens de faire la politique.

Et dans un pays où la base politique dépend des prébendes qu’on distribue, plus vous avez des moyens à distribuer, plus vous êtes en mesure de créer une base politique. Donc, ces sociétés sont devenues aujourd’hui des sources de financement d’activités politiques, de la clientèle politique, donc la prévarication est encouragée par le Président lui-même. Tous les directeurs qui sont à la tête des structures sont tous des hommes politiques de premier plan de leur parti, l’Apr ou de la coalition au pouvoir. Je pense qu’il doit être extrêmement difficile sans une pression citoyenne que Macky Sall initie des poursuites judiciaires contre ces personnes.

Ce sera impossible. Il faut vraiment que le front citoyen se mobilise pour l’obliger à lâcher ne serait-ce que certains d’entre-elles sinon il va les protéger. Lui et Mahammad Boun Abdallah Dionne ont déjà commencé à discréditer les rapports. Il parle maintenant de commission qui sera chargée d’examiner les rapports. On ne veut pas de commission. On veut qu’il transmette ces rapports  à la justice. Les juges sont plus qualifiés que n’importe quelle commission pour examiner ces rapports. La Commission nationale de réforme des institutions avait recommandé que pour les postes non électifs, en l’occurrence les postes de directeurs généraux des sociétés nationales qu’on puisse pourvoir à leurs directions par des appels à candidature et qu’on choisisse les Sénégalais les plus compétents pour les gérer. Malheureusement, Macky n’a pas accepté cette recommandation. Tant qu’on ne nommera pas les directeurs généraux des sociétés et des agences par appel à candidature sur la base de la compétence, on aura toujours cette prévarication.­­

ME PAPE SÉNE, PRÉSIDENT DU COMITÉ SÉNÉGALAIS DES DROITS DE L’HOMME (CSDL) : «Il est prématuré de parler d’absence de sanction»

«Les rapports viennent d’être publiés. On ne peut pas parler de sanction. Je pense qu’il faut laisser le temps de suivi des recommandations qui ont été faites. Dalleurs, le président de la République a décidé de créer une commission pour examiner ces rapports. Il est donc prématuré de parler d’absence de sanction. Il ne faut pas  qu’on se focalise sur la sanction. Car, la vocation d’un rapport, c’est après avoir décelé des manquements, qu’on initie la correction à travers des recommandations. Maintenant, s’il y a des excès dans le comportement de certains agents, en ce moment, le rapport propose des sanctions. Tout ce qui est contenu dans un rapport n’est pas constitutif à la loi pénale, il y a des manquements qui font l’objet d’autres processus. Le rapport c’est un tout, il constate des faits et il révèle des manquements et fait des recommandations. C’est celles-là (recommandations) qui permettra à l’autorité d’opérer des reformes, parce que des manquements peuvent être liés à certains textes, c’est tout ça le sens d’un rapport. Il arrive que la Cour des comptes décèle des manquements d’extrême gravité qui nécessitent qu’une autorité judiciaire saisit telle ou telle personne, je pense qu’il faut laisser le soin à l’autorité judiciaire le temps de consulter. Il faut que tout le monde prenne le temps d’exploiter ces rapports, et l’autorité qui a donné le rapport va donner des orientations. Ce qui m’intéresse très sincèrement, dans un rapport au-delà de ces poursuites, ce sont les recommandations qui ont été faites pour le bon fonctionnement des structures publiques. Je salue l’initiative du président de la République de créer une commission pour examiner ces rapports. Je ne suis pas d’accord avec ceux qui pensent que, quand on parle rapports de la Cour des comptes, on crie au scandale. Un rapport, c’est pour déceler des manquements qui peuvent arriver dans le fonctionnement de certaines structures et qu’on pourrait corriger avec les recommandations proposées. Je pense que il y a des autorités qui ont l’habileté à faire ce travail, il faut avoir une approche beaucoup plus positive du rapport, nous sommes dans un Etat de droit et de démocratie, c’est pour cela qu’on a mis en place ces rapports».

 

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