Accueil ActualitésSociété « Cleaning Day », les raisons d’un échec populaire

« Cleaning Day », les raisons d’un échec populaire

par admin

L’appel du chef de l’Etat Macky Sall à une forte mobilisation des populations à l’occasion de la première édition de la Journée nationale du nettoiement, célébrée samedi dernier, n’a pas été bien entendu par les Sénégalais. Lesquels, dans leur écrasante majorité, ont préféré rester chez elles. Pour connaître les raisons d’un tel échec, Le Témoin a interpelé des spécialistes notamment le sociologue Djiby Diakhaté, l’analyste politique, Dr Atab Badji, et le journaliste Ibrahima Bakhoum…

Le constat a été presque unanime. La première édition de la Journée nationale du nettoiement a été marquée par une très faible mobilisation des populations. Lesquelles, semblant faire fi de l’appel à une mobilisation massive lancé par le chef de l’Etat Macky Sall lors de son adresse à la Nation du 31 décembre dernier, ont préféré se terrer chez elles. Constant qu’il y avait effectivement une faible mobilisation des populations à l’occasion de ce « Cleaning day », le sociologue Djiby Diakhaté estime qu’en termes d’actions, c’était effectivement un échec. Selon lui, beaucoup de facteurs expliqueraient cet échec de la mobilisation de samedi dernier. « Depuis quelques temps, la présidence nous bombarde  des  slogans  comme  Fast-tract, clean challenger, clean day, etc. Des slogans qui n’ont rien de sénégalais. 

Sur le plan de la sémiologie, il y a donc problème », se désole le sociologue Djiby Diakhaté. Qui rappelle que dans les années 90, il y avait un phénomène « Set Sétal » porté par les jeunes, notamment le mouvement navétane, qui avait fait tâche d’huile parce que ayant eu l’adhésion de la population dans sa grande majorité. La deuxième raison de cet échec du premier « Clean day », selon le professeur Diakhaté, est qu’il n’y a pas eu d’étude préalable. Il s’explique : « Avant de commencer une telle initiative, il fallait parler aux acteurs notamment les imams, les leaders religieux, les mouvements de femmes et de jeunes, les Badienou Gokh entre autres organisations. Et tout faire pour les faire adhérer à cette initiative. »

La troisième raison procèderait, selon M. Diakhaté, d’un problème de communication. Car, selon lui, la communication ne doit pas seulement être une communication media. Mais, elle doit aussi se faire en hors média. Notre interlocuteur pense qu’il fallait travailler dans le sens de la territorialisation de la communication. La dernière chose dont il fallait tenir compte, selon le sociologue, c’est la « sacralisation de l’espace ».

PR DJIBY DIAKHATÉ «Beaucoup de paramètres ont été négligés»

« Vous savez, il y a ce que l’on peut appeler la sacralisation de l’espace qui change de la localité d’origine à la localité d’accueil. Quand les gens sont dans l’espace où ils sont nés et où leurs parents ou grands-parents sont enterrés, ils font tout pour préserver cet environnement. Mais, lorsqu’ils se déplacent dans un autre espace, la sacralisation de l’espace disparait. Ils peuvent salir ce nouvel espace et  en  faire  ce  qu’ils  veulent.  Il  fallait  donc prendre cela en compte » souligne en conclusion le membre du CNRA Djiby Diakhaté. Pour Cheikh Atab Badji, analyste et MBA en sciences politiques, une politique de nettoiement aussi importante que celle de samedi dernier devait nécessiter une plus grande préparation. Après avoir rappelé que le fait n’est pas niveau et que c’est uniquement le vocabulaire qui a changé, M. Badji pense que le fait de nettoyer entre dans le cadre d’une politique d’hygiène. Donc, si le lancement n’a pas connu de succès, c’est parce que l’opération a été plutôt décrétée « alors qu’une opération de ce genre ne se décrète pas. »

DR ATAB BADJI « Une opération de ce genre ne se décrète pas »

« Une politique environnementale nécessite une préparation de longue durée. Le Président devait  d’abord  mettre  sur  pied  une politique de nettoiement et d’hygiène avant tout lancement. Il faut que les gens sachent déjà pourquoi il ne faut pas salir et qu’on leur explique que cela a pour but  de garder son environnement sain », explique notre analyste politique. Selon notre interlocuteur, il faut que l’on puisse intégrer cela dans le curriculum des enfants. Il préconise aussi de prendre des mesures dissuasives contre les récalcitrants. De son côté, le journaliste Ibrahima Bakhoum avance deux raisons pouvant expliquer, selon lui, la non-adhésion des populations à la première journée du « Cleaning day ». La première c’est le fait que les gens peuvent se dire que c’est un slogan ou un discours comme les autres discours et slogans. Ce qui justifierait que la parole du Président ne suffise pas seulement à les mobiliser. Le doyen Ibrahima Bakhoum pense également que les gens commencent à être très saturés des déclarations politiciennes. « Si pour eux l’appel du Président ressemble à un appel politicien, cela pose problème», estime-t-il.

IBRAHIMA BAKHOUM « les Sénégalais ont l’habitude de recevoir des moyens financiers des politiciens pour pouvoir répondre à leurs appels »

La dernière raison de la non-adhésion des populations viendrait du fait que, selon M. Bakhoum, on serait resté pendant longtemps dans l’incivisme social. Donc, il faudrait, à l’en croire, plus qu’un appel du président de la République pour pousser les populations à adhérer à ses initiatives. Il s’explique :  « Comme vous le savez, les Sénégalais ont l’habitude de recevoir des moyens financiers et autres des politiciens pour pouvoir  répondre à leurs appels. Peut-être que cette  fois-ci c’est parce qu’il n’y a pas eu ces moyens qu’on a vu ce qu’on a vu.

 Peut-être aussi que nos compatriotes pensent que cette affaire est politicienne et qu’on doit les donner des moyens pour qu’ils puissent répondre à l’appel au nettoiement » estime notre interlocuteur. Selon lui, toutefois, si le discours est maintenu et que des leaders sociaux et religieux s’engagent dans sa promotion, cela pourrait, dans la durée, connaître une très grande réussite. Wait and see !

 

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