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Des journalistes plaident non coupables

par pierre Dieme
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Pour les journalistes Mamadou Thior, président du CORED et Ibrahima Lissa Faye, président de l’APPEL, la confidentialité des documents ne doit pas prendre le dessus sur le droit à l’information

Arrêté dimanche dernier, 6 novembre et placé sous mandat de dépôt hier, mercredi 9 novembre dans le cadre de l’affaire «Sweet Beauty», le journaliste Pape Alé Niang est poursuivi pour «divulgation d’informations non rendues publiques par l’autorité compétente de nature à nuire à la Défense nationale», «recel de documents administratifs et militaires», «diffusion de fausse nouvelles de nature à jeter le discrédit sur les institutions publiques». Dans le traitement médiatique de cette affaire, certains journalistes et même des hommes politiques semblent s’attarder sur la divulgation de document confidentiel et oublier les «révélations» faites par Pape Alé Niang qui seraient graves au cas où elles seraient avérées.

Pour les journalistes Mamadou Thior, président du Conseil pour l’Observation des Règles d’Ethique et de Déontologie dans les medias (CORED) et Ibrahima Lissa Faye, président de l’Association des Professionnels de la Presse en Ligne (APPEL), la confidentialité des documents ne doit pas prendre le dessus du droit à l’information.

MAMADOU THIOR, PRESIDENT DU CORED : «La Procureur doit aller au-delà et voir si les informations contenues dans ce document-là sont avérées»

«Cette histoire de documents confidentiels, ce n’est pas une première. En 2004, quand on avait arrêté Madiambal Diagne et l’avait incarcéré pendant trois semaines à Rebeuss, on lui avait opposé le même motif. Donc, un journaliste, dans le cadre de ses enquêtes, s’il tombe sur un document d’intérêt public, il le porte au public. Souvent aussi, secret défense, secret de l’enquête, dans la plupart des cas, ça ne repose sur rien du tout. Les gouvernants se réfugient derrière ce subterfuge pour un peu faire taire les journalistes et un peu leur fixer une ligne à ne pas franchir. Il ne faut pas aujourd’hui que le journaliste, de ce côté-là, se laisse manipuler parce que nous, notre rôle, c’est de déterrer les cafards que les gens essaient de cacher si ces cafards-là sont dignes d’intérêt pour l’information du public. Quelque part, il faut voir avec les faits exposés par Pape Alé Niang à propos de ce fameux document d’enquête de la Gendarmerie, est-ce que les faits sont avérés ? Si c’est le cas, je pense que c’est un bestseller qu’un journaliste peut faire là-dessus, approfondir l’enquête. Quelque soient les faits, la Gendarmerie est un corps d’élite, s’il s’avère qu’il y a des comploteurs qui ne sont mus que par leur intérêt personnel pour ternir l’image de la Gendarmerie, c’est extrêmement grave et la presse ne doit pas laisser passer ça. Donc, de ce côté-là aussi, il y a des choses à faire pour voir la véracité de ce document-là et des informations contenues dedans. On a arrêté Pape Alé Niang pour recel de documents mais je pense que le Procureur aussi doit aller au-delà et voir si les informations contenues dans ce document-là sont avérées et si c’est le cas, il doit ouvrir une enquête de ce côté-là même s’ils soient de gens de la Gendarmerie. Ils n’en sont pas moins des justiciables. De ce côté-là, il faut aussi que justice se fasse s’il y a de griefs qui sont soulevés et qui sont réels».

IBRAHIMA LISSA FAYE, PRESIDENT DE L’APPEL : «Ce n’est pas parce que c’est secret défense ou c’est estampillé secret que le journaliste n’a pas le droit de publier»

«Selon les journalistes, il n’a jamais publié un document estampillé secret. Dans notre métier, nous avons appris à faire des investigations et à parfois rendre public ce qui est caché et que les autorités ne veulent pas que ça soit connu au grand public, c’est ça notre métier. Secret défense oui mais ce qu’il ne faut oublier, c’est le journaliste et la rédaction qui sont habilités à décider si une information va être publiée ou pas. Si cette information est digne d’intérêt, la rédaction peut la traiter et la publier. Ce n’est pas parce que c’est secret défense ou c’est estampillé secret que le journaliste n’a pas le droit de publier. Maintenant, il faut aussi de la responsabilité parce qu’il y a certains détails comme par exemple le nombre de chars de l’Armée nationale, on ne doit pas mettre ça à la place publique. Mais, s’il y a des contrats douteux qui laissent penser qu’il y a eu corruption, malversations ou détournements. Si le journaliste a accès à ces documents-là, il va les exploiter et informer le public ce qui s’est réellement passé. Donc, il ne faut pas dire que c’est secret défense et que le journaliste n’a pas le droit de publier ou de traiter cette information. Il a le droit d’investiguer et d’informer. Ça fait partie de la charte des journalistes. Il ne faut pas l’oublier. On parle de l’article 5 du Code de la presse mais aussi il y a des exceptions. Il y a un encadrement à faire. Il faut qu’on le sache. Dans le cas de Pape Alé Niang, les faits sont connus de tous et sont partagés en foison. Donc, il n’y a plus de secret. Par exemple, le message radio de la Police, beaucoup de personnes l’ont vu, l’ont partagé. Donc, là, il n’y a plus de secret. Il faut qu’on revienne à la raison pour dire aux confrères dans cette affaire, ils doivent être solidaires, nous sommes sur un terrain très délicat et les tensions politiques actuelles font que personne n’est épargné. Aujourd’hui, c’est Pape Alé Niang, demain ça peut être un autre journaliste. Donc, il faut qu’on fasse très attention et nous devons continuer à défendre notre profession parce que ce n’est pas la personne de Pape Alé Niang qui compte mais le c’est le principe de la liberté de presse qui est le plus le important. Il faut que les gens sachent qu’ils peuvent se retrouver à la place de Pape Alé Niang aujourd’hui ou demain que ce soit avec Macky Sall ou quelqu’un d’autre parce que les politiques sont tous pareils».

Mariame DJIGO 

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