Les derniers jours d’un régime Par Adama Gaye*

par pierre Dieme

Tous les pouvoirs politiques atteignent leur durée normale de vie quand ils perdent l’ultime once de popularité qui leur reste. C’est le cas de celui de Macky SALL.

Il en est désormais réduit à chercher des…explications pour comprendre pourquoi, malgré les suspicions voire les charges, lourdes et graves, qui pèsent sur Ousmane Sonko, l’un de ses adversaires politiques les plus coriaces, il ne se trouve plus personne de crédible pour prendre la défense des accusations qu’il ourdit contre lui.

C’est comme si, froidement, tout le monde lui disait: “même si vous l’aviez pris sur le fait, filmé, forcé à se confesser, ça ne nous fait pas changer d’avis; violeur ou vagabond sexuel, Sonko peut l’être mais notre souci n’est pas seulement de le soutenir, c’est d’abord de chasser le pouvoir que vous incarnez!”.

Sommes-nous en face de ce qu’on appelle le syndrome de Stockholm, ce phénomène psychologique observé chez des otages ayant vécu durant une période prolongée avec leurs geôliers et qui ont développé une sorte d’empathie, de contagion émotionnelle vis-à-vis de ceux-ci, selon des mécanismes complexes d’identification et de survie?

Les foules qui épousent la cause de Sonko refusent toute rationalité. Elles renvoient à celles du Liberia qui lors de l’élection présidentielle ayant porté au pouvoir le plus grand criminel du pays, chef de guerre sanglant, Charles Taylor, accouraient à ses meetings électoraux, en clamant: “Il a tué mon paa, je vote pour lui; il a tué ma maama, je vote pour lui!”.

Leur attitude procédait d’un souci d’affirmer que peu importe, puisqu’elles se sont déjà engagées et ont déjà payé le prix fort, elles ne reculeraient pas.

Dans l’affaire dite Sonko, c’est le rejet total, la décrédibilisation du pouvoir de Macky SALL, qui fait la difference. Comme si, soudain, dans un accès de surréalisme, les foules qui transcendent les partisans politiques du leader de Pastef se disent qu’il est l’instrument du destin pour se débarrasser de pire que lui, d’abréger leurs souffrances et donc d’en découdre enfin avec ce régime qui a mené le Sénégal à la banqueroute.

Imagine-t’on des foules formant un bouclier autour de Dominique Strauss-Kahn, l’ancien patron du Fonds monétaire international (FMI), quand il fut accusé de viol par une femme de ménage à New York, voici 6 ans? Impossible. Indécent. Illégal.

Or, que Sonko ait fauté ou pas, qu’il mérite d’être socialement condamné ou pas, le fait, sans précédent, est que sans se soucier du qu’en-dira-t-on, si puissant dans la société sénégalaise, le camp de ses soutiens sur une affaire si délicate ne perd pas en…légitimité.

On peut même penser que plus le régime de Macky SALL l’acculera, faits et preuves à l’appui, même avec des documents visuels l’incriminant, moins il aura de prise sur ses supporters.

Cette bataille est perdue par le pouvoir parce qu’il a épuisé ses charmes pour séduire ou attirer les gens vers lui. C’est un ras-le-bol général que son effet repoussoir produit.

Ce que les Sénégalais lui disent est fort simple: dégagez, nous ne voulons rien entendre de vous et nous préférons avoir affaire à un homme qui faute que de nous coltiner un régime qui complote, corrompt, combat irrégulièrement pour masquer sa faillite ou nous faire oublier sa banqueroute.

Il ne reste plus qu’à le finir. Deviennent risibles les analyses de tel chroniqueur, pourtant talentueux, qui suggère qu’Ousmane Sonko aurait dû avouer qu’il a péché par…virilité pour espérer ramasser les votes de ses compatriotes. Ou les manœuvres de telle femme intellectuelle, fine littéraire, s’étouffant qu’on ne tire pas sur Sonko alors qu’elle ne s’offusque jamais sur les dérives du pouvoir, y compris sexuelles. Sans oublier que la faute alléguée du neo-politicien intervient dans un contexte où l’économie a fini de battre de l’aile, le Président est incognito, un de ses ministres mouillés dans un scandale de drogue, les forces de sécurité exténuées et delegitimées à force de torturer les citoyens et que l’avenir est on ne peut plus sombre.

Dans les moments de violence qui l’embrunissent davantage, au milieu des éclats d’obus, se joue une partie décisive: celle de la fin de règne d’un régime cuit. À bout de souffle. Se retrouvant dépossédé de ses arguments et affronté par des foules prêtes à mourir pour le déloger.

Ce n’est plus le sexe mais la haute politique, la survie, d’un pays qui est en jeu. D’une certaine manière, nous vivons les derniers jours du régime de Macky SALL, privé de son appareil respiratoire: celui qui nourrit ses mensonges pour exister.

A trop miser sur la destruction de la réputation de ses adversaires pour justifier ses propres turpitudes, le régime de Macky SALL pousse désormais le peuple sénégalais à adopter une colère violente pour lui dire: ça suffit !

Vermoulu et immoral, ayant détruit les fondamentaux du pays, volé ses ressources et saccagé ses finances, rendu irrespirable la démocratie sénégalaise, enfoncé notre armée dans une guerre au Sud, bradé le patrimoine national, dont la souveraineté, ce régime doit cesser de vivre pour que les sénégalais survivent.

Quiconque, à ce stade crucial, le soutient est un ennemi de la nation.

Il doit être combattu jusqu’à sa chute. Immédiate.

C’est son procès qui a commencé au milieu des violences urbaines et rurales vers sa fin.

Adama Gaye* est un exilé politique opposant au régime de Macky SALL.

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